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GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
4 octobre 2014

SERIE : Fargo saison 1 - 2014

fargo-prison

2014 sera définitivement l'année des séries : après l'immense True Detective, après le grandiose P'tit Quinquin, voilà ce Fargo tout aussi génial, on est repus. La série s'appuie sur le déjà sympathique film des frères Coen, en prolongeant les arcanes et les sous-trames, et se montre très fidèle en esprit à son modèle. Les personnages sont en gros les mêmes, la trame principale aussi, le paysage itou ; mais surtout la série parvient à retrouver ce ton inoui inventé par les Brothers, un humour noir associé à une violence sèche, une symphonie pour loser dépassé dopée par ses personnages forts, le tout sur fond de neige striée de rouge. Plaisir total de suivre cette descente aux enfers d'un tout petit mec qui, parce qu'il a rencontré le mauvais gars au mauvais moment, va voir sa minable existence d'assureur dominé bouleversée par les meurtres, les traques de la police et les enquêtes à rallonge.

fargo-2

Fait rare, d'abord, dans une série : les acteurs sont excellents. Martin Freeman surjoue avec bonheur son pathétique homme sans qualité, plein de tics et de lâcheté, jusqu'à sa métamorphose en homme à femmes sûr de lui ; Allison Tolman est parfaite en fliquette pugnace et normale, avec ses yeux de merlan et son courage discret ; le couple de tueurs à gage fait carrément oublier celui des Coen tant il est crédible et fun (on dirait un duo désaccordé de Tex Avery, sauf que celui-ci vous exécute des gars à tours de bras) ; Bob Odenkirk, est aussi drôle ici, et dans un tout autre registre, que dans Breaking bad. Mais surtout, grande idée de casting, Billy Bob Thornton est gigantesque. Il interprète un tueur à gages à la limite du surnaturel, tuant en pleine rue des dizaines de gusses, sans souci des caméras de surveillance ou des gardes à vue qui en découlent, comme un surhomme, comme un fantôme. Il joue la chose avec un mélange de dandysme grand crin (les costumes sont vraiment bien) et de clownerie macabre, sans jamais se départir de son flegme suave : il est donc parfaitement effrayant, exerçant une fascination étonnante sur le spectateur (on se retrouve clairement de son côté, alors qu'il est le diable incarné), à la fois très drôle et détestable.

Fargo-episode-two-011

Avec une telle interprétation, la série trouve un ton parfait, et a la bonne idée de raconter sa trame (relativement complexe) d'une seule traite, sans passer par des circonvolutions ou des constructions de récit sophistiquées. Sa sophistication, elle la trouve dans les ambiances, dans ce très curieux regard, dans ce style indéfinissable. C'est à la fois complètement relâché (on peut passer de longues minutes sur une scène qui ne sert strictement à rien dans la trame policière) et tendu comme un string (les pics de la série sont gérés de main de maître, notamment ce grandiose avant-dernier épisode, construit comme un film d'horreur : un massacre au début, puis on retient l'action jusqu'au bout du bout pour crisper le spectateur, c'est génial). Bourré d'idées de mise en scène et de grands moments, Fargo peut se permettre de reproduire le fameux massacre en hors champ de Scarface de Hawks avec encore plus de brio (on suit une tuerie en travelling depuis l'extérieur, et on ne perçoit ce qui se passe qu'à travers les cris, une vitre qui se brise), de faire des envolées vers un fantastique onirique très étrange (avec plus ou moins de réussite d'ailleurs : l'épisode central est complètement raté, faisant basculer la série dans le fantastique, redistribuant les cartes des caractères... pour mieux revenir dans les derniers épisodes sur ce qui fait la grandeur du scénario), de consacrer de nombreux plans à la simple beauté du paysage (le film est cadré en plans larges, souvent en très grand format, et met magnifiquement en valeur la blancheur unie de la région), de nous plonger parfois dans une inattendue mélancolie, ou de nous faire marrer avec un type qui tue sa femme à coups de marteau. C'est miraculeux d'arriver à tenir un tel fragile équilibre, une telle homogénéité de ton, sur les dix épisodes, et on espère que la deuxième saison annoncée (avec une autre histoire, d'autres acteurs) sera aussi superbement tenue.

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Commentaires
N
Moi je dis que c'était moins bien avant.<br /> <br /> Bawé : Asher, Hunebelle, De Sica, Delannoy, Sarafian, Truffaut, Barboni, Ed Wood, Melville, Zinnemann, Clément,.. hon hon, pas les négliger ceux-là.<br /> <br /> Tandis que maintenant, on a Meirelles, Gray, Hyeong-Cheol, Padilha, Satoshi Kon, Gavin O'Connor, Adam Leon, Steven Kastrissios, Kore-eda, Gareth Evans,.. que d'solides gnières !
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H
Aaah le fameux discours sur ceux qui disent "c'était mieux avant..." <br /> <br /> Mon âge me permet de penser comme ça, et merci de me suivre sur presque tous les réalisateurs cités....<br /> <br /> <br /> <br /> En réalité, je dis juste que c'est moins bien maintenant. Nuance. .
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A
Aaah le fameux discours du "c'était mieux avant....". Mon age m'interdit de penser comme ça, même si je vous suis sur presque tous les réalisateurs cités (sauf les Coen).... <br /> <br /> <br /> <br /> J'ose même pas vous dire que j'ai aimé le dernier Dolan... c'est pas parfait, c'est un peu poseur mais ça rafraichit et, au moins, il essaie.
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E
Si seulement Barton Fink n'avait que des défauts de rythme. <br /> <br /> Si seulement les frères Con pouvaient cesser de faire des films...<br /> <br /> Et idem Tarantino, et Scorsese, et Dany Boon, et Woody Allen, et Wes Anderson, et Manu Payet, et Paul Thomas Anderson, et Michael Mann,et les frères Dardenne, et le duo Intouchables, et .... et... Pffiou...! <br /> <br /> Le Cinéma redeviendrait un art. <br /> <br /> Xavier Dolan se pointe à l'horizon. Hélas.
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A
Et Bondy alors il a aimé ?<br /> <br /> <br /> <br /> Belle critique sinon (qui vous rachète des "gros défauts de rythme" du Barton...).
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