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11 juin 2014

Temps sans Pitié (Time without Pity) (1956) de Joseph Losey

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Il est fort ce Joseph Losey, on a beau dire. Un père alcoolique doit sauver son fils alcoolique de la pendaison, autant dire une histoire qui pourrait arriver à tout un chacun - quand bien même j’ai une fille. Le père, le temps de sortir de sa dernière cure au Canada, n’a plus que 24 heures pour sauver son fils de la corde anglaise. Une gageure. D’autant que les premiers rapports père-fils sont ultra tendus (le fiston n’a jamais rien reçu de son père, il ne veut surtout pas que celui-ci lui donne dans la dernière ligne droite de faux espoirs) et que la dive bouteille ne cesse de narguer papa. 24 heures pour sauver la peau de sa chair, le père est-il prêt à tout faire ?

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Cette œuvre est un vrai régal. Il y a tout d’abord le côté ultra speed de la chose : le pater n’est pas Jack Bauer mais il est pris dans un tourbillon de rencontres, de tentations (allez, un ptit coup for the road… arrière Satan) qui rendent le film très prenant. Un montage au cordeau, des changements d’angle de prise de vue qui surprennent, l’efficacité du Losey n’est plus à démontrer. Son décorateur (digne de celui de Cléo de 5 à 7 ou de celui des films de Wong Kar Wai) truffe le set de pendules, de réveils  et l’on est constamment sous le joug de ces aiguilles qui, à chaque séquence, condamnent un peu plus le fiston. L’un des points culminants est atteint chez cette alcoolique qui collectionne les réveille-matins (elle prend un malin plaisir à les faire sonner maintenant qu’elle n’a plus rien à branler). Les tic-tacs permanents, les alcools qu’elle offre volontiers à son invité (le pater, forcément, en pleine recherche de LA preuve qui innocenterait son fils) rendent celui-ci encore plus fébrile et l’on sent que tout se joue à chaque seconde : soit le père craque et son fils n’aura plus aucun échappatoire, soit il tente de résister et peut-être qu’une preuve va soudainement se révéler… Le suspense est total.

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Le second aspect fortement intéressant de la chose est à trouver dans la famille Stanford elle-même qui a accueilli à bras ouvert le fiston : best friend du fils (et comme dirait Edith Cresson, chez les Anglais, c’est toujours suspicieux… - allons, ne soyons pas mauvaise langue), très très proche de la mère, adopté par le père, on sent que le fils entretenait des liaisons dangereuses avec cette famille ;  la cerise sur le gâteau, c’est que le père, véritable tyran au sein de sa famille ou en tant que chef d’entreprise, est absolument abominable. Ses crises de colère (que l’ami Joseph aime à filmer en contre-plongée et en gros plan) sont absolument dantesques, ses yeux parvenant littéralement à lancer des éclairs - ce n’est pas qu’une expression, non. On aurait presque l’impression d’un règlement de compte familial post-Theorem qui ne peut que mal finir…

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Enfin, il y a forcément l’évocation de la peine de mort. Losey évite le piège - qui hérisse l’ami Gols -« c’est mal pour les innocents » puisque l’un des personnages du film se bat contre la peine de mort en général. Le cinéaste ne tombe point dans cet écueil, donc, mais joue diaboliquement avec cette frontière d’être reconnu coupable… pour un meurtre que l’on n’a pas commis. Le final est absolument éblouissant, la mise en scène de la dernière séquence (photogramme vu dans le numéro 700 des Cahiers qui m’a donné le déclic) tout à fait sidérante. Une parfaite petite mécanique dans laquelle le gars Michael Redgrave (qui fait très bien le regard humide de l’alcoolo de base) est impeccable.  Une œuvre parfaitement charpentée du gars Joseph. 

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