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8 juin 2014

Memories of a Morning (Recuerdos de una Mañana) (2011) de José Luis Guerín

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En quarante-cinq minutes, Guerín parvient une nouvelle fois à donner une image bien pathétique de notre époque : un violoniste s'est défenestré il y a peu dans son quartier - tout le monde l'entendait jouer, le connaissait, personne ne lui parlait. Chagrin d'amour, manque d'argent ou simplement détresse de la solitude, qui sait ?, notre musicien - qui ne semblait pas très doué a priori - a fini par faire le grand saut pour agoniser sur le bitume. Guerín capte sous tous les angles la fenêtre de la victime, l'endroit, près d'une petite fontaine, où le gars a terminé sa chute et surtout enregistre les paroles de tous ceux qui, dans le quartier, ont "partagé" sa musique. Oui plus personne ne se salue, oui il manque de parcs, d'espaces publics pour se rencontrer, oui chacun vaque à ses occupations, s'enferme dans son appart jusqu'à ce qu'un drame survienne et qu'on évoque cette figure anonyme du quartier... et puis the (urban) show must go on.

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Guerín parvient à capter un petit moment d'émotion dans chaque interview (le choc de sa découverte, étendu, nu, agonisant ; sa musique qui, comme celle du saxophoniste, animait le quartier ; sa timidité, son effacement qui sont nostalgiquement évoqués...), les commerçants du quartiers jouant les éternels fatalistes (Ah ma bonne dame, si on avait su... mais chaque année on boit... au jour de sa mort), les simples quidams regrettant cette absence de communication entre voisins, les musiciens se demandant s'ils ne seront pas amenés à finir également un jour les dents dans le béton... L'hommage est sobre, discret, convient à cet homme de peu dévoué à l'âme de son violon ; sans esbroufe, la caméra de Guerín trouve souvent des angles malicieux pour donner de la "profondeur", de la résonnance aux paroles qui sont lâchées : deux statues (la plus grande semblant veiller sur la plus petite) se glissent dans le champ alors qu'une femme évoque la maladie de son mari, le reflet dans une vitre d'un homme avec son instrument apparaît dans un coin de l'écran alors que sa petite fille évoque le musicien disparu, ou encore cet archet qui glisse sur des cordes et pointe vers le balcon de l'immeuble opposé où se trouve une voisine... C'est plein de retenue et d'une évidente efficacité. Du José Luis Guerín pur jus.

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