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15 mars 2014

2 Automnes 3 Hivers de Sébastien Betbeder - 2013

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C'est comme ça : certains cinéastes, sur le ténu sujet des amours fragiles et de la difficulté de vivre, se vautrent dans le nombrilisme ou le banal, et d'autres réalisent des petits trésors. Betbeder est dans la deuxième catégorie. On ne sait pas trop pourquoi, tant son film travaille le presque rien et le pas tout à fait grand chose, mais il y a dans 2 Automnes 3 Hivers un charme mélancolique, une délicatesse de traits et une justesse de sentiments qui vous chavirent l'organe. Oui, on peut aimer un cinéma un poil plus vaste et ambitieux, mais pourquoi ne pas se laisser aller au charme de cette chronique des amours, des joies et des peines d'un petit groupe de trentenaires dans le monde d'aujourd'hui ? Hein ? Pourquoi ?

2automne

Betbeder aime la vie, et met dans son film tout ce qui en fait la texture : le petit comme le grand, les tragédies comme les anecdotes banales, les films qu'il a vus comme les femmes qu'il aime, le moindre petit sentiment qui passe comme les grands moments inoubliables. On accorde la même place à l'AVC de son meilleur pote qu'au dernier Judd Apatow, les racontant tous les deux avec la même volonté d'être à la bonne place du sentiment qu'ils déclenchent. Parce que boire trente Leffe avec un pote ou entendre crisser la neige sous ses pieds, c'est après tout aussi important que souffrir d'être quitté ou recevoir un coup de couteau. Betbeder parvient à ce résultat rare : parler de la vie comme elle est, dans sa grandeur comme dans sa petitesse. Il y est aidé par l'infiniment délicat Vincent Macaigne (qui a dû faire environ 34 films cette année), sorte de Doinel moderne, qui en a la même fantaisie et la même tristesse : comme le héros de Truffaut, Macaigne campe un personnage intello, rêveur, pas tout à fait de cette époque et en même temps les deux pieds dans la réalité et intemporel. On a l'impression que le personnage était le même à l'adolescence, aussi fragile et pitoyable, aussi attachant et grandiose. On est pourtant loin du monde "adulescent" : les sentiments décrits, et qui dessinent d'ailleurs une vraie réflexion sur la difficulté d'être adulte, sont sérieux, forts. Ca parle de trahison de ses idées, d'avortement et de temps qui passe, c'est pas rien.

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L'écriture de Betbeder est délicieuse, désuette par son aspect très littéraire, légèrement "fausse". On y entend des phrases magnifiques, quelques alexandrins, quelques réflexions très justes, des sorties eustachiennes, voire même des haïkus ("Posé sur mes genoux, dans un sac en plastique, le bonsaï agonise"). Les procédés de mise en scène, eux, ne tiennent pas forcément la route tout du long : les adresses directes à la caméra, le découpage en très courts chapitres désordonnés, les apparitions intempestives de chansons (Moustaki repris par l'ensemble de la distribution, merci Christophe Honoré), tout ça est joli le temps d'un court métrage mais apparaît un peu maladroit et répétitif à la longue. Mais le style est là, aucun doute, le film a une vraie patte, qui tient à pas grand chose mais qui vous rentre doucement dans la tête, comme une chansonnette de Souchon par exemple. En tout cas, la justesse est de mise, reposant dans les détails et la précision des situations : une attaque cérébrale traduite par le regard d'un chat, ou une expérience de mort imminente qui vire au rêve gaguesque, par exemple. Au final : un délicieux moment dont on ressort tout embrouilliferlicoté.

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