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Shangols
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24 janvier 2014

L'étrange Monsieur Victor (1938) de Jean Grémillon

"- Au lieu de faire la tête, tu ferais mieux de dire c’que t’as. Quoi, t’as mal aux dents, la cuisine n’est pas bonne ? Ben dis-le ! Ah c’que les hommes peuvent être lâches… Ah c’est pas toi qui fais des scènes ni qui bats ta femme. Toi, c’est le silence… L’incompris, mmh ? Monsieur joue le philosophe mais il prend de grands airs parce qu’un gigolo m’a dit deux mots. Ben mon ptit fallait prendre une femme moche, une bossue... Dieu sait pourtant si je suis sérieuse. Et tu veux savoir pourquoi ? Parce que je suis bête. Seulement je commence à les regretter les occasions que j’ai eues. Un cordonnier, ah mais tu crois que j’peux pas trouver mieux, hein ? Alors ça commence à me travailler de voir les années qui passent et d’avoir rien, rien que monsieur qui m’fait la gueule et son moutard qui déchire ses culottes. J’suis pas couturière, moi, je suis pas cuisinière non plus ! Quand on veut s’offrir une femme comme moi, on a des devoirs ! Parfaitement on se débrouille. Mais te regarder bouffer, te regarder ronfler, j’en ai assez, tu comprends ! Et ça va changer, CA VA CHANGER !!!... Mais qu’est-ce que tu fais ? Où est-ce que tu vas ?

- Eh ben je vais dîner tranquillement si tu permets, bonsoir…"

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Putaing, un film avecque l’accent, ça faisait longtemps. Cela m'a forcément fait penser à l'ami Bastien (qui voulait les interdire, les gens avec accent, tout bonnement) et ce d'autant que c'est le prénom du héros du film, Bastien Robineau (interprété par le gars Pierre Blanchar), un simple cordonnier qui va se faire accuser d'un meurtre qu'il n'a pas commis. J'ai presque tout dit au niveau de l'histoire, si ce n'est que le vrai meurtrier (que l'on découvre dès le départ, je « spoilie » pas tout) n'est autre que Raimu, un receleur fort en gueule qui n'aime pas qu'on le fasse chanter et qui va commettre l'irréparable. Il tentera de se racheter (un petit poids sur la conscience) en abritant le gars Bastien lors de sa cavale... Au générique on peut noter aussi la présence de la douce et fidèle Madeleine Renaud (Madeleine, la femme de Raimu) et de l'opportuniste caractérielle Viviane Romance, la femme de Robineau - c'est elle qui nous sert cette magnifique diatribe mise en chapeau, un coup de gueule à l'énergie qui assomme son mari (ouais, les zincs, c'est fait pour ce genre de soirée-là, mon gars, quand tout part en vrille...).

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Ce qu'on apprécie toujours le plus, dans ces bons vieux films français vintage, ce sont quand même les dialogues (les grand Charles Spaak) qui fusent. Raimu, qui me fait toujours un peu peur a priori dans le genre je parle pas je hurle, m'a quand même bien fait marrer à plusieurs reprises ; qu'il se la joue de mauvaise humeur avec sa femme (la mauvais foi qui flingue) ou extrêmement nerveux quand il apprend l'échappée belle de Robineau, qu'il te la joue rassurante (quand il décide de jouer les bon Samaritains) ou qu'il te coupe la parole net (le ptit voyou freluquet sur la fin qui a bien du mal à pouvoir en placer une...), il a à chaque fois un vrai sens de la réparti et du timing qui fait mouche.

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Grémillon use à bon escient des ellipses (le procès, les années de bagne) se concentrant sur les rapports qui s'installent entre ses personnages principaux - l'attirance malgré eux dans la seconde partie entre Bastien et Madeleine. Ce qui surprend sans doute le plus au départ, c'est que le film soit interdit aux moins de 16 ans et on voit mal comment le gars Jean en 38 a pu réaliser un film ultra gore... Un meurtre, quelques gros mots (oups), un adultère dans l'air, un type relativement immoral (en 38, certains savaient déjà joliment et putassièrement cacher leur jeu - visionnaire le Grémillon... )? Mouais, c'est tout me direz-vous ? Les films de Tarantino devraient aux moins être interdits au moins de 345 ans, proportionnellement parlant. Bref... C'est comme ça. Le réalisateur nous fait également sentir l'air marin de la rade de Toulon avec ses marins, ses partis de pétanque, son kiosque à musique et ses averses apocalyptique. Même si le film baisse un peu d'intensité lors de la seconde partie en huis-clos, l'ensemble reste franchement prenant grâce aux petits numéros des acteurs - joli sens également du montage, résolument dynamique. On prendra plaisir à continuer d'explorer la filmo du Jean. 

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