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Shangols
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25 octobre 2013

La Légende de Zatoichi (vol. 8) : Voyage meurtrier (Zatôichi kesshô-tabi) (1964) de Kenji Misumi

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Surement l'un des épisodes les plus émouvants de la série et je ne dis point cela parce que ma fille a aujourd'hui l'âge fellinien de 8 mois et demi. Ce huitième opus semble annoncer la série des Baby Cart (dont Misumi, quel hasard, réalisera 4 des 6 épisodes) puisque notre bon masseur aveugle prend cette fois sous son aile un baby - suite à un malheureux, pour ne pas dire tragique, quiproquo : 5 samouraïs (facilement reconnaissables grâce à leur capsule de Perrier sur la tête) veulent surprendre notre Ichi dans un palanquin ; seulement voilà, notre gars a laissé sa place quelques secondes plus tôt sur la route à une jeune femme éreintée avec son nouveau-né : juste après le virage c'est elle qui se fait bêtement transpercer par les samourais (mauvais timing, oui). Ichi a le sens des responsabilités et se met martel en tête de ramener le gamin pissoteux à son père. En route, 87 yakuzas tenteront de lui faire la peau mais notre Zato, têtu comme une bourrique, ira crânement jusqu'au bout de sa mission.

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Qu'est-ce qu'il y a de plus traître que d'attaquer un homme par derrière, avec un sabre, pendant que celui-ci change des couches ? Une foultitude de fourbes nippons tenteront le coup mais tomberont sur un Ichi particulièrement en rogne (rien de plus chiant que de changer des couches et je dis cela en humble spectateur mâle) qui sera forcément sans pitié. On s'amuse bien souvent de ces mignonnes situations où notre Zato se plie en quatre pour trouver des couches (le coup de l'éventail et celui des étendards : mortels), situations qui tranchent avec les scènes de combat toujours aussi radicales : une attaque, un geste d'Ichi, trois cadavres qui gisent dans la poussière. Misumi nous fait gentiment ricaner par petites touches - des situations où les gags ne sont jamais lourdingues (même si la séquence avec les sumos quasi jumeaux flirte avec le burlesque - quel est le point faible d'un gros sumo ? Je vous laisse la surprise) - mais c'est surtout dans la dernière demi-heure qu'il nous fait définitivement craquer.

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Avec une mise en scène ultra-sobre - quelques plans-séquences en caméra fixe -, il parvient peu à peu à nous faire toucher du doigt toute la tendresse - le mot n'est pas trop niais - qui va voir le jour entre Zatoichi, la jeune femme voleuse qu'il a "recrutée" en cours de route et le baby. Une scène au début du film était déjà pleine de grâce (la magnifique séquence où Zatoichi tente d'apprendre les paroles d'une berceuse qu'une jeune femme, sur un pont, en pleine campagne, chante à son enfant) mais c'est surtout dans la dernière ligne droite que l'émotion va poindre ; notre Zatoichi qui tente toujours plus ou moins de jouer au dur (je rends le gamin et puis basta, je reprends la route) se lézarde progressivement au contact du bambin. Il tente toujours avec l'amie voleuse de n'en rien laisser paraître (tout comme avec la pute qu'il paye... pour qu'elle s'occupe du gamin - il clame qu'il veut enfin dormir tranquille mais vérifie quinze fois que le gamin est assoupi avant d'aller se coucher - la donzelle hallucine) mais dès qu'elle a le dos tourné, il s'attendrit comme un brie coulant sur le bambin. Ce n'est bienheureusement jamais mièvre car rappelons au passage que le gars Shintaro Katsu est loin d'être la moitié d'un acteur. Il est d'ailleurs aussi bluffant en gros bébé qui craque (lorsqu'il réalise qu'il va devoir se séparer du gamin) qu'en tueur avide totalement furax : son regard... de feu, lorsqu'il affronte ses 43 derniers ennemis de l'épisode, est particulièrement terrifiant  - à ce propos d'ailleurs, la stratégie de base pour l'attaquer était plutôt bonne ; la tactique sera, elle, plutôt faiblarde : notre masseur aveugle combattant à l'oreille, l'idée de faire un max de bruit en l'assaillant semblait bien pensée ; on se dit que ses ennemis vont l'attaquer avec des crécelles ou avec des mini gongs... que nenni, on découvre lors de cet assaut qu'une quarantaine d'hommes l'entoure avec une torche - même si la bande-son est gonflée en voulant nous faire croire que les torches font un max de bruit, le feu n'est tout de même point le truc le plus bruyant du monde (dites-moi si je me trompe). Mais passons... la scène finale est quant à elle absolument déchirante : le film avait commencé avec un Zatoichi au milieu de ses frères de (mauvaise) fortune - tous aveugles - ; il se termine avec un Zatoichi qui évite volontairement la même bande, comme s'il prenait définitivement conscience de son statut d'éternel solitaire banni de toute "vie commune", au sens large. Poignant, si, si, ce huitième opus.

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Commentaires
S
Oui, du ptit lait, définitely, Zatoichi...
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M
Salut Shan, salut Gols, la confrontation entre ce vieux solitaire de Zatoichi et le bébé reste un des épisodes les plus émouvants dans la vingtaine que j'avais vu, je reste persuadé que les opus signés par Misumi sont supérieurs à la moyenne. Est ce dans celui ci qu'il essaie de lui donner le sein ?
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