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12 juillet 2013

LIVRE : Le Journaliste et l'Assassin (The Journalist and the Murderer) de Janet Malcolm - 1990

le-journaliste-et-l-assassin,M113590Un livre paraît-il culte aux States mais qui ne nous arrive que 23 ans après sa publication, un sujet de base intrigant, voilà qui attire l'oeil. Satisfaction : cet essai de Janet Malcolm sur la moralité du journalisme d'investigation est diablement intéressant, et pose dans une écriture serrée et efficace les bonnes questions. La dame part d'une affaire psychologiquement complexe : dans les années 70, un gars est accusé du meurtre de sa femme et de ses deux filles ; un journaliste parvient à obtenir de sa part qu'il suive tout le procès de l'intérieur pour pouvoir écrire un bouquin sur l'affaire ; les deux deviennent copains comme cochons ; mais quand le livre sort, consternation : il est à charge, présentant l'accusé comme un monstre sanguinaire et pychopathe. La question est donc : l'auteur est-il coupable d'avoir manipulé l'accusé pour faire son livre.

A partir de ce cas passionnant, Malcolm décline toute une série de problématiques liées au journalisme, envisagées du point de vue moral et psychologique. On pense bien sûr à De sang-Froid de Capote, souvent cité, dans cette description du trouble ressenti par celui qui, face à une réalité un peu décevante, la transforme pour en faire une fiction. Très pertinent, l'essai va assez loin dans l'analyse psy de ces rapports entre sujet et auteur, se gardant bien de tout commentaire sur l'acte criminel lui-même pour se concentrer sur le "crime" non moins intéressant consistant à trahir l'homme sur lequel on écrit. De minutes de procès en interviews, de réflexions éthiques en consultation d'archives, Malcolm traque par tous les sens son personnage énigmatique de journaliste, rentrant dans le lard des avocats ou des témoins de l'affaire, questionnant le protagoniste principal (MacDonald, l'accusé de meurtre) et se torturant sur les droits et les devoirs de son métier. Pour en arriver à la conclusion mi-ironique mi-sincère résumée dès la première phrase du livre : "Le journaliste qui n'est ni trop bête ni trop imbu de lui-même pour regarder les choses en face le sait bien : ce qu'il fait est moralement indéfendable." Tout ça est fait dans une écriture efficace (même si parfois un peu lourdaude ou touffue) et dans un souci d'épuisement du sujet qui fonctionne très bien. A lire si vous voulez devenir journaliste ou avoir du répondant face à Norman Mailer.

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