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Shangols
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14 février 2013

Dans la Maison de François Ozon - 2012

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Un grand film raté, dirais-je avec, je l'avoue, un soupçon de prétention. Dans la Maison avait tout pour être un de ces grands films conceptuels que Ozon a su réussir par le passé. Il est même à mettre en parallèle avec un de ses plus grands films, Angel, puisqu'il fonctionne à peu près sur le même principe. Ce dernier reposait entièrement sur la question du point de vue : on assistait à une bluette racontée par une nana fleur bleue, et le film prenait le risque insensé d'être raté exprès, puisque la personne qui le racontait était elle-même quiche. Ici, c'est pareil : tout est raconté par un jeune adolescent découvrant les charmes de la littérature et de l'écriture. Un adolescent qui écrit maladroitement, qui gère mal ses effets, qui est encore très versé vers la psychologie de bazar, le simplisme des luttes de classe, le trouble sexuel de base ; du coup, vraie audace, le film prend une nouvelle fois le risque d'être mièvre, kitsch, schématique, ridicule : c'est qu'il adopte entièrement le point de vue de cet adolescent mauvais écrivain, nous montrant au premier degré la somme de ses fantasmes qui partent dans tous les sens... à moins que cette kitscherie ne soit que la vision de son prof de français, lui-même écrivain raté, et qui pourrait bien être "l'auteur" final du film... à moins que, pirouette ultime,  nous ne soyions nous-mêmes, nous spectateur, les auteurs de ce que nous sommes en train de regarder...

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On le voit, Ozon jongle avec une certaine virtuosité avec les points de vue : qui crée ? lui ? le personnage ? le spectateur ? Qui raconte, et dans quel style ? Suivant que l'auteur est talentueux ou non, le film s'infléchit brusquement, passant par plusieurs genres, plusieurs styles, de la satire chabrolienne à l'érotisme M6, du pasolinisme pour débutants à la comédie américaine, du teenage movie au cinéma psychologique. C'est tout le talent d'Ozon d'oser le ridicule, le kitsch. On apprécie qu'il revienne à cette prise de risque-là, après les gavants films lisses de ces dernières années. On aurait aimé, vraiment, mettre Dans la Maison dans le même panier que les films expérimentaux du gars (5x2, Angel, Ricky, 8 Femmes).

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Malheureusement, on ne peut que constater que Ozon semble définitivement passé du côté de la force obscure, c'est-à-dire qu'il ne semble plus obéir qu'à une injonction : "faire un succès populaire". Ce film est donc complètement raté à cause de cette drague du public : à chaque fois qu'on entrevoit ce qu'il pourrait être en termes d'expérimentation, Ozon recule et lisse le tout. Pas assez audacieux, pas assez couillu, il s'enfonce assez vite dans la petite comédie amusante et gentiment sulfureuse, sans jamais prendre à bras-le-corps son sujet. Terrorisé sûrement par l'échec (en nombre d'entrées) d'Angel, il ne réitère pas l'exploit : il veut cette fois-ci qu'on l'applaudisse. Et c'est difficile d'être à la fois Pasolini ET Luc Besson... Aussi, son film est sans arrêt le cul entre deux chaises : celle des intellos et celle des spectateurs du samedi soir. D'un côté, il se gausse de l'art contemporain (représenté par la femme du héros, Kristin Scott-Thomas, galeriste en pleine errance), de l'autre il veut en faire ; d'un côté il défend la puissance hypnotique de la littérature, de l'autre il déifie une sorte de style de gare bas-de-gamme. On ne sait plus trop sur quel pied danser, on ne sait plus si la fausseté du jeu des comédiens est voulue ou subie, on ne sait plus si les kitscheries de la mise en scène sont vraiment des provocations ou de gros plantages de goût. Au bout du compte (et malgré ce très beau plan final sur une façade de maison où se projettent tous les fantasmes du spectateur), on sent bien que Ozon s'est échoué sur les rives du succès à tout prix, et que ses grandes audaces formelles et scénaristiques sont derrière lui. Sur ce coup-ci, en tout cas, on s'ennuie pas mal (plein de longueurs), on est à peine dérangé sur son siège, et on a bien l'impression d'un des films les plus consensuels du gars... Raté, oui, malgré les intentions.   (Gols 18/10/12)


J’hésite entre “passablement passable” et “pouvait mieux faire mais peut-être plus maintenant ». Le fait est que je ne mettrais pas la moyenne, 100 % d’accord sur le coup avec l’ami Gols. Le problème avec Ozon c’est qu’à force de flirter avec la soi-disant « parodie » ou « l’humour légèrement ironique sur un genre », il finit toujours par tomber dedans par excès ou par maladresse : à l’image d’Angel qui critiquait l’univers rose-bonbon des livres genre Harlequin et qui n’était qu’un film à l’univers rose-bonbon (l’ami Gols dirait « Mais non ! » auquel je répondrais malheureusement un « Ben si… » - mais on a déjà débattu de la question et Gols en reparle dans sa chronique ci-dessus). Ici, on flirte avec la banale intrigue policière de téléfilm (on sent tout de suite, dans le fond et dans la forme, qu’on n’est pas dans l’univers, au hasard, d’un Hitchcock ; un type s’introduit dans une maison, dans un foyer pour y faire… po grand-chose (le suspense commence et s’arrête pratiquement là… à la porte, quoi) ; les images grisâtres font penser à une série de France 3 (vintage, oui… Ozon semble ne plus avoir les moyens d’avoir un vrai chef-op… Dès la première séquence, on est à contre-jour et c’est affreux visuellement), les personnages à ceux des reportages de France 3 Auvergne : c’est terne, c’est moyen, c’est beauf… Oui mais on s’en moque !!!! Ben oui, mais c’est quand même terne, moyen, moche… et terriblement attendu : le gamin (Ernst Uhmauer qui est bien, sobre… ce qui est certes plus facile quand on joue avec le grimaçant Lucchini) sympathise avec l’ado qui a des pulsions homo (ho ho), avec le père pour une amitié virile (hi hi), avec la mère pour des baisers volés (hé hé)… Quand ça commence à ressembler à du Pasolini (sans le soufre), hop hop, Lucchini le cite comme s’il voulait prendre de cours le spectateur : oui, oui, c’est fait exprès, parodie eheh. Quand ça commence à devenir franchement gnangnan et cucul Lucchini prend encore les devants : « On dirait du Barbara Cartland », voilà c’est dit, donc c’en est pas vraiment puisqu’on s’en moque ? See what I mean ???... C’est juste gavant. On passe d’une resucée pasolinienne sans réelle provocation (…) à de la guimauve mollasse, avec en fil rouge l’histoire (à suspens…) de l’arroseur arrosé, du manipulateur manipulé, de l’éducateur éduqué, du pseudo-écrivain dans une pseudo intrigue policière… C’est pas méchant, c’est juste qu’avant, chez Ozon, on sentait une vraie pointe de folie, de provocation non gratuite… Là, on assiste à des séquences affreusement ratées (genre le gamin embrassant Emmanuelle Seigner ou couchant avec Kristin Scott-Thomas… Aïe), et c’est tellement pathétique, terne, plat, pour ne pas dire « absurde » (on y croit pas une seconde… oui mais c’est parod… Oh shut up), qu’on a un peu honte de voir un film aussi poussif signé Ozon… Bref, j’aurais mieux fait, une nouvelle fois, de rester sur le seuil.   (Shang 14/02/13)

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Commentaires
S
Ah oui, et ces acteurs ! Très très inégaux (le père, quelle catastrophe)
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