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10 février 2012

La Femme de Seisaku (Seisaku no tsuma) (1965) de Yasuzo Masumura

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Jusqu'où peut-on aller par amour ? Quelles sont les limites ? Okane (la magnifique Ayaka Wakao) semble repousser les limites au maximum : parce que sans lui, elle ne peut vivre, parce que s'il part à la guerre, il va mourir... D'où ? Une des séquences les plus affreuses que j'ai vu depuis longtemps... Mais le pire, c'est que cela est vraiment pour la bonne cause... Mais bon, je commence par la fin. Avant d'en arriver à ce point crucial, on avait fait la connaissance avec Okane (mariée très jeune à un vieux qui a clamsé et qui lui a donné un ptit pécule par testament, elle retourne avec sa mère dans leur village d'origine où ils sont considérés comme des pestiférés) et le gars Seisaku (le gendre modèle, accueilli comme un héros au village à la fin de son service militaire) ; l'une est considérée comme une traînée, bonne-à-rien, l'autre est perçu comme un foudre de guerre qui veut sortir de sa léthargie ce paisible village (il a acheté une superbe cloche avec sa solde et il se fait un immense plaisir à taper dessus tous les matins pour réveiller les jeunes gens du village et les pousser à bosser dans les champs : un cauchemar). A la mort de la mère d'Okane, ça manque po : les deux se croisent et crac c'est le coup de foudre ! Les gens du village sont outrés et nos deux tourtereaux de baiser où bon leur semble : leur bonheur d'être ensemble leur permet de toute façon de mépriser le qu'en-dira-t-on...

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On est au tout début du siècle, on a droit jusque là un portrait assez probant de la misère paysanne mais surtout de la connerie humaine : la jalousie (celle des femmes comme celle des hommes, l'égalité dans la connerie est indiscutable), la mesquinerie semblent guider nos amis villageois qui ne se gênent jamais pour lâcher une réflexion graveleuse sur notre jeune couple. On pense qu'on est tombé bien bas dans le mépris, ouh là là, on est encore loin du compte... Survient alors un événement terrible pour Okane : vous n'êtes pas sans savoir, qu'en 1904, la Japon et la Russie vont entrer en guerre et forcément Seisaku va être appelé sur le front... Pendant son absence, Okane va vivre le martyr et les langues des villageois de se défouler pour balancer, à la moindre occase, une saloperie sur son compte... Seisaku est blessé lors d'une mission suicide à Port Arthur et il va passer une journée en convalescence dans le village ; Okane est tout à son bonheur mais quand il lui annonce qu'il veut derechef repartir sur le front, elle sent bien, et d'une, qu'il va à la boucherie, et de deux, qu'elle ne pourra survivre à sa perte... Est-elle prête à tout pour qu'il reste ? Je pense, les amis, que la réponse et oui... Vous aimez le gore sinon ?

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La violence verbale et physique des villageois va atteindre son paroxysme après l'acte effroyable commis par Okane. Entre les propos ignobles qu'ils vont tenir (à l'encontre des deux d'ailleurs, même si dans l'histoire le pauvre Seisaku n'y est po pour grand-chose...) et les coups de tatanes qu'ils vont distribuer pour tenter d'écraser Okane, on a rarement vu pareille ivresse - et stupidité - collectives... Mais le film n'est pas qu'un simple portrait de cette paysannerie arriérée. Là où Masumura fait vraiment fort, c'est au niveau des liens entre Okane et Seisaku. Celle-ci a commis un acte franchement impardonnable... que seul un amour absolu pourrait pardonner. Et c'est ce qui va finir par nous cueillir, la déclaration d'amour finale nous laissant les bras ballants et les jambes en coton - j'ai dormi depuis, j'ai récupéré, je vous rassure... Masumura, dont on apprécie toujours au passage son travail sur le cadre - la façon qu'il a de jouer avec le Scope en découpant son écran, horizontalement, en deux ou trois parties si vous voyez ce que je veux dire (comme je ne ne sais po faire de dessin avec mon clavier, voire les photogrammes ci-dessus où la tête des personnages est : première image, dans la première moitié, seconde image, dans le troisième tiers), livre un film qui prend aux tripes, avec un spectre thématique qui va de la bassesse morale à l'amour, en passant par la misère et l'horreur... Mais, fusil, quel amour ! 

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