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7 février 2012

Ragtime de Milos Forman - 1981

2940657623_1_9Ragtime en a pris un coup dans les gencives en 30 ans, et pour tout dire ce genre de produits estampillés 80's à mort a bien du mal à résister au vieillissement. Les intentions de Forman sont pourtant tout à fait louables, et son ambition aussi : le gars voudrait nous faire vibrer avec une histoire d'injustice sur fond de discrimination raciale dans l'Amérique ségrégationniste des années 1900. Un petit pianiste de jazz noir est embringué dans une historiette idiote de racisme ordinaire, il décide que c'est inacceptable, et il tombe dans un terrorisme qui se retournera contre lui et ses idées. On le voit, Forman recherche la corde humaniste, et la fait d'ailleurs parfois vibrer. Côté style, le projet est transparent : lui aussi veut sa fresque à la New-York New-York, ses reconstitutions au taquet et ses moyens délirants. Il l'obtient, et ne sait guère quoi en faire : certes, les costumes sont vraisemblables, l'ambiance y est, la patine des décors est impeccablement rendus par une couche au brou de noix de la meilleure qualité, la musique (excellente) est d'époque, mais tout ça sent le réchauffé, le déjà-vu (en mieux) chez d'autres. Forman manque encore du souffle qu'il trouvera avec Amadeus pour s'atteler à un projet aussi pharaonesque ; son Il était une fois en Amérique est trop sage, trop scolaire, trop académique pour vraiment emballer.

18957521_jpg_r_640_600_b_1_D6D6D6_f_jpg_q_x_20080702_114648Ça se regarde sans déplaisir, les acteurs ont du bagout (ou des bajoues, comme notre bon Jimmy Cagney qui vient faire un tour-surprise là-dedans), il y a quelques séquences bien glamour... mais ça ne prend jamais réellement. Forman multiplie les trames sans nécessité : pourquoi parler de cette prostituée (Elisabeth McGovern, pas terrible) ou de ce dessinateur russe devenu cinéaste ? Ils ne servent qu'à une image finale assez téléphonée (la nouvelle Amérique, avec cette "famille" constituée d'un père russe, d'une mère bourgeoise américaine, d'un bébé noir), alors que leurs tribulations prennent une bonne partie du film. Pourquoi nous montrer un assassinat de vengeance amoureuse au début ? On ne sait pas trop, et le film aurait dû se contenter de sa trame principale et durer une heure de moins sûrement (c'est très long, fresque oblige). D'autant que, quand il en revient à celle-ci, il est plutôt bon dans l'écriture des personnages, qui sont subtils, complexes : le héros, notamment, est bien dessiné dans son indignation qui se transforme en révolte imbécile, et qui finit par se mordre la queue. Il a un dialogue avec un prédicateur black qui marque des points dans son questionnement : à force de lutter pour sa reconnaissance en tant que noir, le gars finit par faire le contraire de ce qu'il faudrait, et par se retourner contre sa propre identité. C'est pas mal, et on sent qu'il y a de l'intelligence derrière tout ça, et pas juste une moralité consensuelle. Rien de déshonorant donc, non, mais un film très oubliable, très concerné sans aucun doute mais qui ne parvient pas à transmettre sa colère.

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