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28 octobre 2011

LIVRE : Clèves de Marie Darrieussecq - 2011

clèvesDarrieussecq s'était déjà transformée en truie ; la voilà qui redevient une jeune enfant pure et vierge dans ce récit autobiographique d'une éducation sexuelle provinciale. Par le menu (bien aimé ces trois parties bien distinctes : "Les avoir", "Le faire" et "Le refaire"), la dame nous conte les affres de la découverte des organes génitaux de ses partenaires de sexe opposé, et le moins qu'on puisse dire, c'est que ce portrait de l'artiste en découvreuse de l'amour ne se fait pas sans heurts : rapports paternels troubles, ambiguïté de sa relation avec un ami de la famille mentor, violence des premiers touche-pipi avec un crétin, désillusions sévères dès qu'il s'agit de mêler à tout ça un peu de sentiments... On en est tous passés par là, et on retrouve avec nostalgie, mais aussi avec un certain effroi, les émotions qu'on eût à cet âge. Car Darrieussecq est juste, dans l'émotion comme dans la reconstitution : elle a un vrai sens du détail véridique, le tout petit truc qui fait qu'on retient un moment de sa vie pour toujours, la toute petite émotion, le mot exact pour définir le presque rien : les plus belles pages sont celles qui décrivent l'exaltation de la jeune fille quand elle retrouve son premier "amour" (un blaireau qui la traite comme une traînée), la puissance de l'émotion quand il l'appelle "Angie", l'ivresse qu'elle ressent à faire partie du groupe de ceux qui "l'ont fait". Comme en plus, Darrieussecq sait toujours parfaitement bien retrouver l'atmosphère de l'époque (nous sommes de la même génération, et c'est vrai que l'évocation des pubs ou des moments de l'actualité des années 80 sonne juste), et tenir son arrière-plan, on croit dur comme fer à cette histoire.

Joliment rythmée (bien que parfois, le sens de l'ellipse virât quelque peu à l'exercice de style virtuose mais vain), l'écriture use de paragraphes courts, comme autant de vignettes photographiques qui figent les détails dans l'éternité. Le vocabulaire est clair et net, appelant une chatte une chatte, donnant au texte un aspect sain et net qui est tout à sa gloire. Après c'est vrai que ça ne va pas plus loin que ça, l'évocation, la joie de partager des émotions communes avec un bon écrivain, et qu'on aurait aimé que Darrieussecq ait un vrai projet ample à l'intérieur de cette petite escapade en enfance. Mais pour cette sensibilité fragile et fine, on se contentera de ce joli texte légèrement trashy.

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