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4 juillet 2011

Lame de Fond (Undercurrent) de Vincente Minnelli - 1946

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Minnelli s'essaye au noir et réussit un très bel objet classique et classieux. Il faut dire qu'il a pour l'épauler l'immense Katharine Hepburn (une de mes trois ou quatre idoles, ce que confirme ce film), et qu'elle sort sans problème la chose du tout-venant qui pouvait parfois le menacer. Si elle n'était pas là, on aurait droit en effet à une énième variation autour du mari coupable (ou pas), vous voyez, ce genre de scénar où une femme épouse un homme qu'elle ne connaît pas et qui pourrait bien être un assassin. Entre Rebecca et Suspicion, quoi. Hitchcockien, le film l'est diablement d'ailleurs, même s'il s'enfonce avec plus de délice dans la noirceur, sans ménager les respirations que Hitch avait su octroyer à Suspicion et sans la patine gothique qu'il avait donnée à Rebecca. Voici donc une jeune fille (Katharine) qui s'éprend d'un richissime homme d'affaires (Robert Taylor, la fadeur faite homme, mais qui joue avec talent l’ambiguïté entre charme et venin), avant d'avoir de méchants soupçons sur ses rapports avec son frère : ce dernier est-il le monstre décrit par Taylor ? A-t-il vraiment disparu sans laisser de traces ? Ou la jalousie n'a-t-elle pas poussé Taylor à assassiner le gars ? L'arrivée de Robert Mitchum (la classe transformée en mauvais garçon, de l'hormone mâle balancée par poignées) ne va pas arranger les choses dans le petit cerveau tourmenté de Katharine.

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Minnelli est très bon pour l'évocation, le non-dit. Le film est littéralement hanté par la présence de ce frère disparu, physiquement d'abord (la maison où tout est resté en place, un livre souligné qu'on retrouve par hasard, un chien qui grogne après tout le monde avant de remuer la queue devant une ombre mystérieuse, des ex qui refont surface), psychiquement ensuite, puisque Hepburn va finalement tomber amoureuse de ce fantôme, sans jamais l'avoir vu, simplement par les fantasmes qu'elle en a. Minnelli fait revenir à intervalles réguliers cette petite rengaine de Brahms, équivalent sonore aux apparitions fantomatiques du frère, qui devient une scie dans la tête de madame, obsédée par cet homme aux antipodes de son mari. Dommage que Minnelli ne sache pas être concis, et se perde dans quelques séquences qui traînent en longueur ou se répètent sans nécessité. Dommage aussi que son final soit si maladroit. Mais le fait est qu'il sait faire monter la sauce, écrire des personnages épais et intrigants, et manier une jolie forme de suspense psychologique.

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Pourtant, c'est dans la comédie qu'il continue à exceller. La première partie du film, toute légère, est indéniablement la meilleure, avec ces petites scènes croquignolettes entre Hepburn et son père (Edmund Gwenn, tiens tiens, encore un acteur de Hitch), avec ces dialogues ciselés au millimètre qui fusent, avec ces tout petits détails taquins : Hepburn qui rêve de Taylor en regardant une éprouvette longue remplie d'un liquide bouillonnant prêt à déborder, je vous jure que c'est ce que j'ai vu de plus sexuel depuis The Devil in Miss Jones (ou depuis Shang chantant dans Faust, plus pervers). Le reste du film est malgré tout impeccablement tenu, et on applaudira donc devant cette œuvre certes mineure mais franchement agréable.

Commentaires
F
Pas grand-chose de noir (un peu de vent dans les rideaux). Trop de bons sentiments. Il fallait voir de l'érotisme dans l'éprouvette mais ce n'est pas forcément la bonne façon de faire des enfants.
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