Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
31 mai 2011

Même la Pluie (Tambien la Lluvia) de Icìar Bollaìn - 2011

19590213_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20101115_023612

 

On ne peut pas reprocher à Icìar Bollaìn ses intentions : à l’instar de son mentor Ken Loach, dont elle a été la comédienne, elle se dresse fièrement contre les injustices du monde dans une posture héroïque de bonne conscience de gauche, qui est bien sûr indiscutable. Qu’on en juge par le sujet en béton armé pour tout cinéaste désireux de prouver à son public que le monde tourne mal et qu’il faut s’opposer au marasme : un cinéaste décide de retracer les premiers temps de la colonisation en Bolivie ; débarquant avec sa bonne conscience en bandoulière, il se retrouve en pleine galère quand les acteurs indigènes de son film déclenchent une grève nationale pour protester contre la privatisation de l’eau qui les prive de l’essentiel ; dans sa volonté de finir son film coûte que coûte, le cinéaste va se montrer aussi exploiteur que ceux qu’il prétendait dénoncer. Peu à peu, la fiction (le film en train de se tourner) va se trouver polluée par la réalité. Beau sujet, il faut l’avouer, et qui aurait pu donner de très belles choses avec une cinéaste un peu plus subtile dans ses dignes intentions.

 

tambien-la-lluvia-foto-distribuidora

 

Car le film est un échec assez cuisant au bout du compte, faute d’une réelle écriture qui ne soit pas autre chose qu’un consensuel exposé moralisateur. Bollaìn échoue complètement à rendre vivant l’espace, le territoire qui l’entoure : à force de s’intéresser à l’humain et à lui seul, elle ôte à son film son contexte, et s’enferme même dans une gênante posture humaniste qui dessert son sujet. L’abus de gros plans est d’autant plus handicapant qu’il met justement en valeur la maladresse quand enfin la caméra prend un peu de champ : les dernières scènes, en pleines manifestations sanglantes, ont tous les airs d’une reconstitution cheap de théâtre amateur, on n’y croit pas une seconde. C’est dommage, car au détour d’un plan ou deux, on entrevoit la photogénie du pays. D’autre part, la cinéaste a vraiment du mal avec les acteurs : ils sont assez mauvais, Gael Garcia Bernal en tête qui ne convainc pas en cinéaste obsédé par son film ; trop gamin, trop candide, il n’a pas les épaules tout simplement : on voudrait voir un personnage d’Herzog, et on obtient une sorte de Oui-Oui en milieu aztèque. Son partenaire principal, le producteur du film interprété d’un bloc par Luis Tosar, souffre du défaut inverse, trop grande baraque pour parvenir à exprimer l’émotion recherchée dans les dernières scènes par exemple. Là aussi, c’est bien dommage, car Bollaìn a su écrire des personnages relativement nuancés et inattendus, les plus nobles d’entre eux s’avérant être les plus troubles, et les plus pleins d’a priori devenant peu à peu les plus honorables. On sent l’extrême vigilance qu’a mise la dame à être délicate et équitable envers ses personnages ; c’est tout à son honneur, mais il aurait aussi fallu diriger ses acteurs pour qu’ils soient à la hauteur de l’ambition. Trop préoccupée par ses grandes idées, la réalisatrice oublie qu’on attend aussi un peu de cinéma là-dedans ; mis à part cet agréable trouble qui surgit quand on se rend compte que le tournage du film déborde sur la réalité, et qu’on ne sait plus où sont les comédiens et où sont les « vraies gens », le cinéma reste sur la touche. Un peu comme chez Ken Loach, oui, vous me voyiez venir depuis la première ligne, non ? Un film à thèse, intéressant dans son fond, inepte dans sa forme.

 

Tambien%20la%20lluvia%20-%20500%20-%2007

Commentaires
Derniers commentaires