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Shangols
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GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
31 mars 2011

Johnny Roi des Gangsters (Johnny Eager) (1941) de Mervyn LeRoy

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Excellent film noir, aussi bien par son somptueux casting (Robert Taylor aussi à l'aise en séducteur à la coule qu'en perfide malfrat calculateur et cynique ; Lana Turner en blonde qui a du chien - si elle tombe "forcément" raide dingue de notre héros, elle est aussi la seule capable de percer la cuirasse du gars ; et puis l'excellent Van Heflin (grande source d'inspiration pour Philippe Léotard qui lui a même piqué sa coupe de cheveux dans ce film...?), le pote contre vents et marées du Robert, un type cultivé qui semble se faire un plaisir de se détruire à l'alcool : rarement vu un acteur aussi crédible en alcoolo), que par son intrigue joliment menée (finesse des dialogues et de certaines réparties, personnages solidement campés, scènes d'action rondement menées dont un magnifique final tonitruant et tragique). Si au départ Robert Taylor, ancien criminel reconverti en gentillet chauffeur de taxi, ne paye pas de mine, le Bob cache méchamment bien son jeu derrière, belle gageure, sa fine moustache. Souriant, affable, charmeur, le type se révèle peu à peu le plus filou des malfrats, manipulant son entourage, pote d'enfance et jeunes femmes enamourées y compris, à sa guise. Derrière ses allures de gentleman taxidriver, le Bob apparaît comme un être solitaire sans foi (amicale et amoureuse) ni loi, le parfait égoïste primaire... jusqu'à ce que la Lana finisse par lui faire "turner" le coeur...

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Chaque mois Robert Taylor doit rencontrer son "tuteur" pour montrer qu'il est enfin entré dans les rangs. Décontracté, sympathoche, on croit dur comme fer que le type a tourné la page, prêt à devenir un honnête citoyen. Tu parles. On découvre rapidement qu'il est le parfait comédien : son taff de chauffeur n'est qu'une couverture à l'ouverture d'un champ de course pour chiens (qui dit courses dit paris, qui dit paris dit gros sous...) et notre homme se révèle rapidement le roi des embrouilleurs pour parvenir à ses fins. Il doit se débarrasser de sa régulière, il lui ment impunément. Il soupçonne l'un de ses potes de le trahir, rien de plus facile pour l'éliminer et paraître blanc comme neige : il se rend à une partie de poker avec les pontes du milieu, feint d'être ivre mort, va se coucher, passe par la fenêtre, monte un traquenard pour éliminer le dit pote, et revient tranquillement de sa chambre reprendre la partie. Ni vu ni connu. Pire, il monte un plan du parfait enfoiré pour que sa nouvelle conquête, la fille du procureur, soit mouillée dans un meurtre ; ce dernier ne peut dès lors rien lui refuser et lui donne la permission d'ouvrir son business : emballé c'est pesé...

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Le seul capable de lui ouvrir les yeux sur sa perversité n'est autre que le gars Van Heflin, rond comme une queue de pelle du matin au soir, mais jamais frileux pour lui dire (avec art, le Van te citant Shakespeare à l'envi) ses quatre vérités ; il sait qu'il n'est aux yeux du Robert qu'une épave mais aussi son seul ami... Quand le Van lui dit entre quatre yeux (dont deux suintant l'alcool) qu'il se comporte comme le dernier des bâtards avec la chtite Lana (la petite larme au coin de l'oeil que l'on retrouvera plus tard coulant sur la joue du Bob : la petite pointe d'émotion qui fait la différence...), notre Robert lui fout un pain et se retrouve définitivement tout seul... enfin, nan, il peut encore compter sur son chien - un vieux lévrier qu'il vient de récupérer et qu'il a toujours jusque là envoyé balader - pour chercher un ultime soutien... pathétique. Cette confession du Van va tout de même lui ouvrir les yeux : Bob se rabiboche avec le Van et décide d'aller payer une petite visite à la Lana pour tout lui avouer... Il ne sait que trop qu'il joue un jeu dangereux, son soudain sursaut de sincérité ayant toutes les chances d'être à double tranchant. Du coût de la rédemption...

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L'alchémie entre Taylor et Turner est évidente, Van Heflin cartonne à chacune de ses apparitions - constamment ivre mort, il est bien le seul à faire preuve d'honnêteté dans ce monde de dupes - et le final conclue avec brio cet impeccable récit. Taylor, dissimulé, lors de la dernière séquence, des pieds à la tête sous un large manteau et un chapeau de guingois - tel un type qui a passé son temps à cacher son jeu -, ne va pas tarder à "se découvrir", "se mettre à nu" pour les beaux yeux de Lana (une déclaration d'amour des plus surprenantes puisqu'il va... assommer sa blonde d'un coup de poing) : la vie de la Belle est plus précieuse que la sienne et même si jusqu'au bout il cherche à jouer les durs (la fameuse petite larme qui le trahit et dont il veut que sa douce n'ait connaissance), on comprend parfaitement dans quelle mesure la Lana, malgré elle, a fini par le faire craquer... La parfaite femme "fatale" en un sens. Un final délicieusement noir dans la fumée des pétards, tout ce qu'on aime, finalement, dans le genre.

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Commentaires
C
Cool !!
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B
Cecilio , j'en profite pour te faire ma ptite révérence pour le fameux Exotica d'Egoyan qui m'a bien chopé dans ses filets ( j'en ai fini désormais avec l'Atom , il a pas pu faire mieux ) Bel objet envoutant et ambigu , qui laisse des questions en suspens et qui montre des persos meurtris , face à eux-mêmes et à nous ( pas mal question de jeux de reflets , notamment avec cette glace sans tain ) , où les rapports humains sont montrés sans fard , sonnent juste et touchent sans tomber dans l'excès ... Je vois bien pourquoi t'es aussi emballé , faut dire qu'il a des choses à dire sur l'être humain cet opus . T'en as pour ton blé . Le traitement est tout en nuances , fragmenté . Le mystère se dévoile peu à peu comme les effeuilleuses laissent tomber leur toilette mais en garde sous le coude au final . Je préfère pas parler de Mia Kirshner et ses strips , la fête dans les slips ouulaa . See , Cilio , on mange dans la même gamelle once again .
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C
Oui, ça a l'air bien. A propos de LeRoy, je me rappelle toujours cette scène... Joseph L. Mankiewicz est en réunion avec un scénariste et d'autres producteurs. Mankiewicz est en train de produire un film de LeRoy et les autres producteurs s'emportent contre le metteur absent, ne comprenant pas ce qu'il fait sur le tournage. Mankiewicz répond ainsi : "I suppose LeRoy s'amuse". Pause. Les producteurs le regardent sans comprendre. Le scénariste ajoute : "That's French". Longue pause. <br /> <br /> Mankiewicz dira plus tard que c'est à cause de ce genre de scènes que les producteurs ont arrêté de lui faire confiance...
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M
Je viens de découvrir Ville haute Ville Basse, du sieur Leroy... Trèèèès beau, mais alors trèèèès trèèèèès beau !!! <br /> <br /> Et mâtin, ce casting...
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