Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
21 mars 2011

La tendre Ennemie (1936) de Max Ophüls

vlcsnap_884792vlcsnap_886794

"Avec La tendre Ennemie, nous vous transportons dans le royaume du rêve, de l'imagination, de la fantasie-eu, j'insiste, de la fantaisie-eu. (...) Saluons enfin cette oeuvre avec d'autant plus d'allégresse qu'elle est française-eu, bien française-eu" - Monsieur Fernand-Bastide (vice président du Syndicat français des Directeurs de théâtre cinématographique - excusez du peu). Une introduction emballée et un tantinet cocardière (mais Ophüls, il est... roh ça va, oui) pour ce film tourbillonnant du cinéaste dans lequel on trouve déjà en germe quelques-uns des motifs (cette valse filmée à 360 degrés, ce "paysage" qui défile à toute blinde en fond d'écran...) et certaines des thématiques (l'adultère, la ronde des amants, l'amur toujurs, le cirque...) de ses ultimes oeuvres. Le film d'à peine plus d'une heure défile à 200 à l'heure (un enchaînement souvent impressionnant de "micro-vignettes" surtout au moment des flashs-back - et met en scène des morts contemplant leurs contemporains tels les anges des Ailes du Désir - Wenders y aurait-il puisé un poil d'inspiration, mouais, possible. La divine Simone Berriau incarne avec charme cette femme fatale qui va finalement bénéficier de circonstances atténuantes, et notre trio de mari et d'amants sacrifiés sur l'autel de son amour (lyrisme, ouais) de venir lui préter main forte pour que sa fille ne connaisse point le même sort. Le triomphe de la passion sur l'amour mou du genou dans un film rondement mené de bout en bout.

vlcsnap_885777

A l'occasion des fiançailles de la fille d'Annette (La Simone), le mari et l'amant de cette dernière se retrouvent : ayant tous les deux été des victimes (directes ou indirectes) de l'épuisante Simone, nos deux fantômes (ben ouais, ils sont morts) tapent la discute, en prenant place dans des lustres ou sur des fils électriques, en en profitant pour picoler dans la cave ou en se reposant tranquillement sur un banc. Le mari raconte par le menu tout ce qu'il a entrepris pour s'occuper d'elle (les fortunes dépensées en fringues ou en bijoux, les multiples soirées et autres sorties parisiennes...) avant qu'elle ne le quitte pour un dresseur de fauves (l'excellent Marc Valbel avec ces rouflaquettes en pointes)... Continuant sur sa lancée en sortant et en buvant plus que de raison, son foie finit par rendre l'âme... Destin guère plus glorieux pour l'homme de cirque qui finit par se faire dévorer par ses propres lions alors même qu'elle l'avait harassée. Les deux hommes se retrouvent liés par leur infortune et leur ressentiment envers la coquette et comédienne Annette jusqu'à ce que survienne une troisième ombre, l'amant de jeunesse d'Annette. Il leur fait comprendre que la pauvre, n'ayant pu vivre cette histoire d'amour - tragique (lui-même finissant par se suicider) -, ne se remit jamais de cette déception initiale ; d'où cette vie passée à aller d'homme en homme sans jamais être satisfaite... Comme il ne faudrait point que la fille ne réitère la même erreur (faire un mariage de raison au lieu d'épouser son jeune amant), ils vont tout mettre en oeuvre pour qu'elle échappe à son triste promis et rejoigne son aviateur chéri.

vlcsnap_886308vlcsnap_886532

Le film défile tambour battant et on aurait presque du mal au départ à reprendre notre respiration : les multiples personnages sont présentés en deux plans trois mouvements de caméra, puis le premier flash-back (le récit du mari) survient presque dans la foulée avec des "ombres" qui défilent continuellement, à chaque séquence, en fond d'écran : le mari meurt après avoir brûlé la chandelle par les deux bouts, on a à peine eu le temps, nous-mêmes, de cligner des yeux. Même maestria pour nous conter l'histoire du dresseur, homme pourtant fort gaillard, qui se fit bouffer par un lion. La Simone, avec sa petite mine d'ange et son art pour les séduire, leur a fait mener une véritable vie d'enfer. Ils apprécieraient presque de pouvoir, dorénavant, prendre le temps de se poser pour discutailler. Ophüls mêle avec art et "fantaisie-eu" le monde des vivants à celui des morts, soignant toujours au millimètre les effets spéciaux à base d'images en surimpression (bien aimé notamment quand les fantômes sont irrités de voir ces vivants leur passer impunément au travers...). Le montage est au diapason (faudrait compter le nombre de plans, hein) et on termine ce film à bout de souffle en se disant qu'Ophüls est décidément un grand cinéaste aussi bien techniquement que dans sa façon de trousser sa narration. Quelle al-lé-gresse, mes amis.

vlcsnap_886699

Commentaires
Derniers commentaires