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8 mars 2011

La Femme aux Maléfices (Born to be Bad) de Nicholas Ray - 1950

vlcsnap_2011_03_07_23h39m37s189Pas que du bon dans la carrière de Ray, et on comprend pourquoi il considérait Born to be Bad comme son plus mauvais film : pas grand-chose effectivement à défendre dans cette satire sociale à gros sabots, qui marche sur les traces de All about Eve sans jamais trouver son vrai style. Trop de scènes dialoguées, des acteurs inégaux, une fin massacrée par les producteurs, peu de nuances dans le dessin des caractères : c'est presque de "l'anti-Ray", tant la subtilité psychologique ordinaire du bougre est enfouie ici sous des tonnes de maquillage et de glamour inutile.

Dans les premières minutes on est intrigué par cette somme de personnages qui tournent autour de la trame sans jamais entrer pleinement dedans : c'est rythmé, efficace, et on sent que Ray en garde tranquillement sous le pied avant d'aborder frontalement les choses, faisant passer la cruauté à venir pour une bluette sentimentale. On assiste à l'arrivée dans la bonne société de la jolie Christabel (Joan Fontaine), recueillie par un couple en plein bonheur conjugal (Zachary Scott et Joan Leslie). Elle est aussitôt courtisée par un peintre (Mel Ferrer) et un écrivain (Robert Ryan). A priori c'est à un tourbillon de situations croquignolettes et superficielles que nous convie Ray dans cette peinture du vlcsnap_2011_03_07_22h57m10s69grand monde et des amourettes de messieurs le bourgeois. Mais peu à peu le personnage de Christabel s'épaissit : il s'agit en fait d'une arriviste pure et dure, qui va tout faire pour gravir les échelons sociaux quitte à marcher sur la tronche des autres : elle brise le couple pour épouser le riche promis, elle envoie valdinguer ce pauvre Ryan comme une chaussette sale, elle manipule les sentiments de chacun, tout en dissimulant sa félonie sous des sourires charmants et une modestie de vierge effarouchée. Tout le film est constitué de cette lente ascension vers de plus en plus de fausseté et de vénalité. La méchante sera-t-elle punie à la fin ? Allez, je balance : oui.

Fontaine fait tout ce qu'elle peut pour interpréter ce personnage négatif sans perdre de son aura de star hollywoodienne. Numéro d'équilibriste dans lequel elle se vautre sans ambage : elle est floue, beaucoup trop mannequin, et Ray ne sait jamais comment la filmer. Par exemple, quand elle est heureuse, elle monte des escaliers en riant, ce qui la fait passer pour légèrement crétine ; quand elle réussit un de ses coups machiavéliques, le chef-op lui balance une ombre oblique et on lui envoie des coups de violons dans les graves, histoire de. Gros effets qui alourdissent un film déjà pas léger-léger dans son propos. Si on ajoute le jeu insupportable de Mel Ferrer, véritable tête à vlcsnap_2011_03_07_23h14m12s47claque qui se prend pour un lion, et celui guère plus convaincant de Zachary Scott en bourgeois naïf, on s'aperçoit du désastre du casting. Seuls Ryan (et ses grandes mains qui emprisonnent presque complètement Fontaine, dame, c'est impressionnant) et Leslie parviennent à conférer une vraie profondeur à leurs ombres de personnages. Le scénario appuie lourdement sur chaque épisode et oublie en chemin la véracité psychologique et la concision du propos (on comprend les tenants et les aboutissants de la trame au bout de 20 minutes, le film durera pourtant ses 90 minutes réglementaires). Même la musique et le montage semblent participer au poids qui s'abat sur tout ça, et on soupire en regrettant le gâchis de stars et de talent.

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