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8 décembre 2010

Le Vengeur agit au crépuscule (Decision at Sundown) de Budd Boetticher - 1957

vlcsnap_2010_12_08_19h22m38s195Voilà un cinéaste dont j'entends parler depuis des années et que je ne connais pas. Ces premiers pas dans son oeuvre me confirment effectivement une réelle personnalité : si formellement le film est conventionnel et transparent, le scénario est complètement étonnant et mérite franchement le détour. On est un peu largué au début, à cause d'une volonté nette de la part de Boetticher de ne distiller ses infos que petit à petit. On ne comprend donc pas grand-chose à cette fausse attaque de diligence, puis à ce personnage obsédé par la vengeance, Allison, qu'interprète Randolph Scott : depuis 3 ans, il est sur les traces de Tate Kimbrough, qui a élu domicile dans le ville de Sundown qu'il dirige d'ailleurs en vrai parrain (shérif et instances politiques à sa botte, même le barman lui est acquis). Il veut le descendre, et ça semble être sa seule raison de vivre. Pourquoi cette soif de vengeance ? On ne le saura que très tardivement, à mi-chemin du film en gros, et du coup tout ce début sonne très étrangement : Allison qui rentre dans l'église le jour du mariage de Kimbrough pour annoncer à celui-ci qu'il va le descendre avant la nuit, puis qui s'enfuit poursuivi par les balles qui sifflent, c'est en même temps complètement faux dans la situation et très intrigant, comme si cette menace de mort n'était finalement pas si sérieuse que ça, comme si la promesse de la vengeance était plus importante que la vengeance elle-même.

vlcsnap_2010_12_08_18h38m20s241Ca se confirme quand les motivations d'Allison sont enfin connues : il veut tuer son ennemi parce qu'il lui a piqué sa femme ! Finalement, le personnage d'Allison est un cocu dépressif, ce qui le rend subitement pathétique et très humain. Toute la ville de Sundown va bientôt subir une véritable révolution, tout ça pour sa femme... qui s'avère en plus être une fille facile et guère farouche avec les hommes. Belle idée que celle de ce misérable motif qui déclenche une véritable guerre civile dans la ville. Peu à peu, tout se resserre, formellement et scénaristiquement, autour de cette écurie dans laquelle se sont enfermés Allison et son acolyte : la ville éprouve un sursaut de responsabilité collective et se dresse contre le petit dictateur qu'est Kimbrough, les femmes ouvrent les yeux sur la véritable nature des hommes qu'elles aiment (et inversement), et la mise à mort programmée du gêneur (Scott, donc, grain de sable humain dans la machine collective) devient un enjeu politique et moral très prenant. Partant du principe que le développement est beaucoup plus important que l'issue, Boetticher amène ce petit monde à un point d'ébullition ultime, avant de finir son truc en désamorçant tout, dans une conclusion pathétique qui épate par son manque d'affect : finalement, tout ça n'est qu'une histoire de vieux cow-boys déprimés et honteux, qui ont voulu jouer aux durs pendant quelques heures avant de retourner à leur tristesse.

vlcsnap_2010_12_08_19h50m05s29La réalisation manque de style, certes, mais Boetticher fait quand même du boulot très propre, et parvient à rendre très concret l'espace de la ville. Le déroulement de son récit, pas si simple à gérer, passe par une grande fluidité du montage, qui ne nous perd jamais malgré l'invraisemblance presque abstraite de certaines situations. Scott est relativement touchant en cow-boy au bord des larmes, et les seconds rôles, étoffés, complexes, sont eux aussi interprétés avec tout le professionnalisme voulu. C'est vrai qu'on peut attendre un peu plus d'un western, mais ma foi il y a dans Decision at Sundown une réelle originalité de sujet, une façon de raconter qui ne ressemble à nulle autre, et une manière de rendre tout ça concis et net qui force le respect. Du travail au cordeau, sans gras, ramassé (1h17 au compteur) et au final impressionnant. Ce coffret Boetticher s'annonce intéressant.

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