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4 décembre 2010

Marché de Brutes (Raw Deal) (1948) d'Anthony Mann

Raw_Deal__1948_

Rarement film noir a autant rimé avec désespoir... Et pourtant on ne peut pas dire que Joe Sullivan (le couillu Dennis O'Keefe) n'ait point tenté sa chance : il se retrouve en tôle suite à un sombre accord avec la pourriture Rick Coyle (Raymond Burr, sévèrement..., oui - le genre de type qui n'hésite point à ébouillanter sa compagne quand il est vénère, pas le gendre idéal, nan); ce dernier, qui lui doit 50000 dollars, une somme, lui offre la possibilité de s'échapper, espérant bien que dans l'action le Joe se fera descendre : un calcul d'un cynisme terrible qui pourrait bien lui revenir dans la tronche comme un boomerang vengeur. Notre Joe passe par miracle entre les balles et parvient à s'échapper avec l'aide de sa régulière, la fataliste mais amoureuse Claire Trevor - elle fait facilement dix berges de plus que lui mais elle est fidèle, la bougresse. Le réservoir de leur bagnole se retrouve percé lors de la fusillade et Joe ne trouve rien de mieux, comme plan B, que de demander de l'aide à une chtite assistante de son avocat, la fracassante Marsha Hunt. Il va chez elle, l'embrasse goulument et cette dernière de se retrouver dans l'échappée belle malgré elle. Ca sent forcément le plan foireux : se faire la malle avec sa compagne et sa maîtresse quand on a toute la flicaille à ses trousses, faut avoir un sacré culot. Mais le Joe n'est pas du genre à se poser de question et fonce dans la nuit avec ses deux gorettes ; l'objectif est clair : rejoindre San Francisco - une trotte - récupérer la thune et se barrer à Panama avec une Claire Trevor qui n'y voit pas beau : c'est elle qui est en charge de la narration du récit et on sent bien au ton de sa voix que, dès le début, elle doute non seulement de son homme sentimentalement - il se gène guère pour fricoter avec Marsha - mais également de la réussite de cette fuite en avant...

raw_deal

Ambiance bizarroïde dans la caisse avec notre Joe et ses deux femmes, ambiance d'une noirceur terrible avec cette échappée jusqu'au bout de la nuit - John Alton, à la photographie, se faisant apparemment un réel plaisir à éclairer aussi peu que possible cette plongée dans les ténèbres. Si Joe passe les barrages de police avec un bol incroyable, il est moins verni lorsqu'il trouve une planque : faut reconnaître que c'est béta de se retrouver dans une baraque alors même qu'une chasse à l'homme est organisée dans les parages pour mettre la main sur un type qui vient de descendre sa femme - l'épisode est guère crédible mais permet d'illustrer à quel point le Joe est loin d'être un enfoiré : il permet à l'homme de trouver refuge dans sa propre planque avant que ce dernier se jette dans la gueule du loup des poursuivants... Le coup lui passe près du chapeau, c'est juste un avertissement : il doit en effet encore se taper un des hommes de main de Raymond Burr qui n'est point venu pour lui filer la thune mais pour lui "régler son compte", définitivement... Gros fight dont Joe parvient à sortir indemne... Finira-t-il par entendre raison et à filer en douce avec la très patiente Claire ou décidera-t-il d'aller voir le Raymond pour lui dire ce qu'il a "sur le coeur" ?... Happy end inattendu ou final dans un(e) marc/e de café/sang?

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Mann livre un récit tendu de bout en bout, multipliant les tensions : quand les menaces ne viennent pas de l'extérieur - les flics, ses anciens acolytes -, elles se font sentir au sein de cet incroyable trio : entre une Claire dévouée mais jalouse de cette Marsha qui vient s'immiscer dans son couple, une Marsha paniquée, capable aussi bien d'alerter les flics que de protéger le Joe, et un Joe écartelé - quelle donzelle choisir, fuir en douce ou se venger -, on ne peut pas dire qu'il y ait beaucoup de place pour la poilade (noter quand même, au passage, la scène où le Joe se retrouve les mains en l'air à côté d'un ours empaillé, exactement dans la même posture : à peine le temps d'avoir un pauvre rictus que l'on assiste à un règlement de compte d'anthologie). Joe parviendra tout de même à rallier San Francisco envahie par des nuées de brumes et on se doute que cela est de mauvaise augure en vue d'une éventuelle éclaircie dans son destin... Joe voulait prendre une bonne "bouffée d'air", il aura droit à une vision infernale (séquence impressionnante de l'incendie) avant d'avoir enfin droit au repos du guerrier... A Panama ou dans un caniveau, là est la question... Un Mann brut de brut.      

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