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29 novembre 2010

Jour de Fête (1949) de Jacques Tati

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Un petit village français qui rappelle son enfance - enfin surtout celle de mon père, on va pas se vieillir pour le plaisir -, des forains (non roumains, tiens) qui débarquent avec leur petit manège, un grand échalas de facteur qui fait sa tournée en enquillant les canons tant bien que mal, un petit film américain avec des employés ultra-entrainés qui vexe notre postier, et ce dernier de se lancer dans une virée d'anthologie où, à la moindre occase, un gag croquignolet (ou une catastrophe) peut surgir... Je me suis fait la version couleur (et non colorisée, attention à qui vous parlez) - enfin plutôt la version couleur passée trente fois de trop en machine - qui garde finalement aussi bien le charme de ce lointain passé - bah, allons, 60 ans, une paille. On sent bien qu'il y a deux mondes qui s'affrontent : celui paisible de cette France campagnarde qui vit à son rythme - la France de l'apéro plutôt que celle des grands travaux - et celui dynamique et tape-à-l'oeil (oui sûrement plus moderne aussi) des "sauveurs" Américains. Ils font même une petite apparition dans ce paysage rural avec cette bagnole de la Police Militaire perdue au milieu de nulle part ; notre postier les bluffe d'ailleurs comme des bleus en leur faisant croire qu'il a le téléphone installé sur son vélo... Eh oui, parce que Monsieur, la France est peut-être encore un gros pays de paysans, la France n'a peut-être pas tous les moyens techniques de pointe, la France n'a peut-être pas de pétrole, mais la France, Monsieur, oui, la France, elle a les idées originales de Jacques Tati, et cela suffit à son bonheur...

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C'est une suite ininterrompue de saynètes drolatiques, de dialogues du cru ("eh ah, le gârs Françoâs, vient donc boire un verrrrre") et de gags burlesques dont certains sont de haut vol - ce vélo qui continue sa route tout seul ou ce splendide plongeon dans l'eau du postier volant qui n'en finira jamais de m'impressionner. Chaque distribution de lettres est motif à deux ou trois trouvailles (le boucher qui coupe le colis en deux, la lettre empalée sur la fourche, la lettre délivrée via la moissonneuse batteuse...), trois ou quatre accidents de parcours (la course de feu avec les cyclistes avant que le vélo du facteur finisse accroché dans la barrière des chemins de fer), cinq ou six borborygmes du genre "eh, oh, ben, donc, oh là" qui sont à chaque fois comme un écho des discours plein de sagesse de mon grand-oncle (il faisait de la gnôle, on ne peut que le glorifier)... Nan, c'est vrai, on ne finit pas plié en quatre, on peut même trouver certaines facilités (le gag du poteau qui dure dix minutes, bon... "Les gârs à droite, à droite, les gârs à gauche, à gauche" - le commentaire marque des points quand même), mais il y a encore et toujours un charme éternel qui se dégagera toujours de ce petit film ; on retrouve le bon vieux Français "romantique" (Roger, le forain) surveillé par sa matrone de femme et faisant les yeux doux à une jeune autochtone, le bon vieux Français picoleur (ah tiens, encore Roger qui saoule notre postier !), le bon vieux Français blagueur (Rah ce con de Roger, jamais le dernier pour faire des tours de cochon au facteur) et même le Français qui cultive son jardin (François finit sa tournée dans les champs, victoire indéniable du monde paysan (travailleur) sur l'administration (des branle-manette)). C'est léger comme un petit jour de fête qu'on avait "dans le temps" (pas un parfum de rance mais plutôt d'enfance, c'est là toute la différence) et drôle... par la force des choses : d'ailleurs, personne en France n'est jamais arrivé, au niveau du burlesque, à l'épaule du grand Jacques. On peut pas piper mot là-dessus.   

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