Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
20 septembre 2010

LIVRE : Suite(s) Impériale(s) (Imperial Bedrooms) de Bret Easton Ellis - 2010

Suite_s_imperiale_s_de_Bret_Easton_EllisD'après ce qu'on lisait un peu partout, Easton Ellis était en pleine dépression après l'ultime et phénoménal Lunar Park. A la découverte de Suite(s) Impériale(s), on ne peut que confirmer : en tentant une suite au grand Moins que Zéro, Ellis s'enferme dans la redite, et ce nouveau roman ressemble effectivement à l'oeuvre d'un dépressif qui, par faute d'enthousiasme, ne sait que reproduire ce qui a fait sa gloire. Or, ce qui fonctionnait il y a 25 ans est devenu aujourd'hui un tic : les phrases courtes, slamées ; les dialogues monosyllabiques ; la société de consommation décrite comme un monstre sanguinaire qui laisse concrètement des monceaux de cadavres derrière lui ; le bling-bling des personnages... Tout ça était totalement pertinent dans les horribles 80's, où on croyait au pouvoir de l'argent et au rêve américain. Aujourd'hui, c'est du cliché. On constate tristement qu'après avoir pondu quelques-uns des romans les plus en phase avec leur époque, Ellis se déconnecte du monde et laisse son curseur en arrière.

Clay est devenu scénariste à Hollywood. Connaissant le cynisme du compère, on imagine très bien la suite : actrices minables mais prêtes à tout pour réussir, soirées cocaïne et partouze, superficialité des rapports humains, monstruosité larvée se cachant derrière la façade glamour... On a droit à tout ça, Clay errant comme une âme en peine dans le petit monde du cinéma qui dissimule le meurtre, la peur et la manipulation. On le voit, tout ça n'est guère surprenant, et Ellis arrive après les autres. On est vite perdu dans tous ces personnages inconsistants et fades qui échangent des propos vides à travers des dialogues hâchés, on se désintéresse bientôt de la vague trame polardeuse (des crimes affreux commis sur de jeunes acteurs, un réseau de prostitution de grande ampleur), et on soupire devant les répétitions, maladresses, et même emphases de l'écriture. Car, au niveau du style, Ellis se montre bien mal à l'aise pour renouveler l'écriture qui fit sa gloire il y a 25 ans. On a l'impression au mieux d'un Moins que Zéro en plus pauvre, au pire d'un roman sentimental branché et crâneur. On sent bien qu'il voudrait approfondir le personnage de Clay, montrer ce que deux décennies ont fait de son mal de vivre, de son autisme, de ses pulsions morbides ; mais Ellis sombre bien trop vite dans le cynisme pour faire exister son personnage : il n'est que surface, thème récurrent chez l'auteur de Glamorama, mais qui prend ici des allures de vitrine de Noël : ça clignote de tous les côtés, mais c'est vide de sens. S'il reste encore quelques pages dont la froideur de description remporte l'adhésion, l'ensemble n'est qu'un roman inutile qui arrive trop tard, qui traite mal de son sujet, et tente désespérément de se faire aimer tout en jouant au punk. Ratage. Profitons-en pour relire les chefs-d'oeuvre du maître.

Commentaires
Derniers commentaires