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11 septembre 2010

LIVRE : Palimpseste - Mémoires (Palimpsest, a memoir) de Gore Vidal - 1995 (2006 pour la traduction)

palimpseste"J'en arrive au point que je redoutais : des listes de noms jadis célèbres mais qui ne signifient dans l'ensemble plus rien aujourd'hui, et qui exigeront des notes interminables aux futurs historiens. Cela pourrait être amusant si j'avais quelque chose de vraiment fascinant à dire sur chacun de ces noms, ou si j'avais eu, comme tant d'autobiographes contemporains, des aventures amoureuses orageuses, des mariages ratés, des enfants autistes, des dépressions nerveuses, des overdoses, des thérapies, bref une vie littéraire. Mais je n'ai eu ni histoires d'amour ni mariages, et le propre d'une aventure sexuelle de passage est d'être oubliable. Je n'ai jamais fait de "dépression nerveuse", mais ai plutôt été victime d'un long effondrement, et j'ai su éviter les psychanalystes, les nutritionnistes et les joueurs de bridge-contrat."

Gore Vidal la joue modeste, comme si sa petite vie, finalement, n'était que purement anecdotique, mais parvient malgré tout à évoquer avec sa plume affutée et souvent caustique quelques grands personnages politiques et littéraires de l'après-guerre. Il est clair que les notes de bas de page s'accumulent, notamment lorsqu'il évoque la vie politique américaine, mais le bougre a quand même cotoyé le haut du gratin - intime de Jackie Kennedy, d'Anaïs Nin ou de Tennessee Williams - et prend rarement des gants quand il s'agit de balancer. Dès son premier roman, Un Garçon près de la rivière, son homosexualité a été affichée, ce qui n'a pas vraiment aidé la suite de sa carrière en cette Amérique puritaine. Mais notre homme a su faire son trou au théâtre, à la télé, voire au cinéma, et même s'il a un peu sacrifié, pour ce faire, sa carrière de romancier, sa vie n'a rien de celle d'un véritable martyr littéraire... Bien qu'il cherche à s'en défendre - il n'est point comme son "frère ennemi" Truman Capote -, Gore Vidal n'est jamais le dernier pour dézinguer les personnes qui l'ont critiqué à un moment de sa vie (de sa mère Nina à la quasi homonyme Nin) ou pour raconter quelques histoires croustillantes sur les écrivains de son temps (du pote Tenessee, ce drôle d'"Oiseau" aux beatniks Kerouac ou Ginsberg). Il apparaît clairement dans ses mémoires qu'il y a pour Vidal deux camps : ceux qui l'aiment, sur lesquels il ne tarit point d'éloges, et ceux qui se sont permis un jour de l'égratigner, qu'il déteste. Cette petite réserve mise à part (po toujours impartial, le Gore), notre homme demeure tout de même assez lucide pour décrire de façon assez vivante et réaliste l'atmosphère et l'ambiance de cette période charnière. Toujours touchant lorsqu'il évoque la carrière impressionnante de son grand-père aveugle, définitivement sincère lorsqu'il parle de son premier - et dernier - grand amour (de jeunesse) tombé à Iwo Jima, souvent saignant lorsqu'il cherche à faire tomber quelques grands hommes de leur piédestal (le clan Kennedy en prend pour son grade). On pourrait regretter qu'il ne s'attarde point sur le processus de création littéraire, qu'il nous montre certains auteurs par le petit bout de la lorgnette plutôt que de juger leurs oeuvres en profondeur, mais son récit proche parfois du "name dropping" demeure malgré tout assez prenant. De quoi donner envie, en tout cas, de relire (l'excellent) Duluth, mais également de découvrir (pour ma part) - Julien notamment - certains de ses romans rarement en tête de gondole dans les librairies françaises.    

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