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6 juin 2010

The White Diamond de Werner Herzog - 2004

vlcsnap_2010_06_06_18h17m02s119Décidément je ne peux pas m'empêcher d'avoir quelques doutes sur l'honnêteté de Herzog en tant que documentariste. Autant j'ai une grande admiration pour le bonhomme quand il fait des fictions, autant ses postures face à la "vérité" me posent problème. Après Grizzly Man, qui fut à son époque un grand sujet de débat sur ce blog, le revoilà flirtant de façon un peu ambigüe avec la mise en scène du réel, avec cette même tendance à dramatiser coûte que coûte qui m'avait déjà agacé chez les ours.

A première vue, on reconnaît dès les premières secondes le sujet herzogien par excellence : on suit les aventures d'un scientifique inventeur d'un nouveau type de ballon dirigeable, et qui veut s'en servir pour survoler la forêt guyanaise ; le "drame" de la chose, c'est que 12 ans plus tôt, la même expérience s'était soldée par un accident ayant entraîné la mort d'un cinéaste embringué dans l'entreprise. Ce sont donc encore une fois les deux thèmes principaux du Werner qui sont exposés : l'obsession d'un homme pour une entreprise risquée, et vlcsnap_2010_06_06_19h14m24s235le cinéma comme moyen d'exorciser une tragédie passée. Herzog retourne sur les lieux, tourne autour de ce drame, et réalise son film comme pour effacer l'échec, le transformer en réussite humaine et cinématographique. Joli sujet, qui donne lieu à quelques séquences marquantes : splendides cadrages sur la nature, hostile et pourtant filmée avec une admiration sans bornes (les iguanes vus dans toute leur étrangeté, la cascade lentissime, les ballets des oiseaux) ; bel attachement pour un personnage secondaire, un Guyanais empreint de sagesse, tourmenté par une déchirure familiale, et qui devient presque plus intéressant que le chercheur ; et portrait effrayant de ce dernier, homme charismatique, brillant, lumineux, et en même temps souvent au bord de la rupture mentale (les éclats dans ses yeux sont assez inquiétants).

vlcsnap_2010_06_06_19h04m31s190Seulement voilà : encore une fois, on a quelques soupçons devant certaines options du film. Ces dialogues peu naturels entre les personnages, visiblement répétés, ou en tout cas trop préparés pour être vraiment honnêtes ; cette façon de "spectaculariser" coûte que coûte les séquences, même celles qui ne racontent rien de particulier (on voit le chercheur bricoler un moteur, et Herzog en voix-off de préciser prophétiquement : "regardez bien, c'est cette pièce-là qui aura toute son importance dans le drame de tout à l'heure") ; ou, plus agaçant encore, cette tendance à se substituer à la vérité au profit du spectaculaire : voulant filmer une grotte mythique que personne n'a jamais vue, l'équipe est arrêtée par un gars du coin qui leur dit que cette grotte et ses mystères font partie de la culture du pays, et qu'il préfèrerait que Herzog ne montre pas les images dans son film ; ce qu'il fait, mais en prenant bien soin de nous dire que lui a vu cette grotte, et qu'il "n'en dira pas plus" : putassier, comme effet, le même que la fameuse cassette soi-disant terrible qu'on n'écoute pas dans Grizzly Man. Il faudrait que Herzog s'y fasse : quand il n'y a pas d'images dramatiques, il n'y a pas d'images dramatiques ; quand il n'y a rien à filmer, on le dit, on ne tente pas de faire croire au pauvre spectateur que ce qu'il ne voit pas est spectaculaire. Du coup, vlcsnap_2010_06_06_18h58m03s156les images vraiment impressionnantes (une charge de gorille filmée par ce fameux cinéaste disparu, incroyable) viennent asséner une bonne claque sur la caboche de Werner, qui n'a rien de ce type à se/nous mettre sous la dent. Bien énervé du coup par ce documentaire qui tord la réalité pour répondre à un cahier des charges hollywoodien (il faut du suspense, du drame, coco), et qui nous manipule par hantise du vide, du rien. Un anti-Depardon, finalement, pas très honnête, un peu roublard, et qui arriverait à vous faire une tragédie en 5 actes avec un film d'entreprise... Intéressant justement par ses limites, dirai-je pour être sympa.

Venez vénérer Werner : ici

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