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27 mai 2010

Fin (Konec) d'Artavazd Pelechian - 1992

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Décidément une nouvelle fois chaviré par le cinéma si simple, si lumineux, si sombre, si beau d'Artavazd Pelechian. Fin est une fulgurance poétique parfaite, une sorte de condensé de grandeur en quelques plans. Nous sommes embarqués à bord d'un train en plein mouvement. On regarde, fixés par la caméra comme d'autres sculptent dans le marbre, des visages, jeunes, vieux, masculins, féminins, insouciants ou graves. Les plans sont assez longs, mais le désordre du cadrage donne un rythme intrigant à ces portraits : Pelechian est à bord du train, et ne cherche pas à trouver l'équilibre dans les mouvements ; ça décadre à qui mieux mieux, ça filme dans l'urgence, même si le regard virevolte sans façon à l'intérieur des plans. On a une belle impression d'intimité dévoilée, surtout à cause du choix génial de filmer tous ces visages de loin, avec 9 fois sur dix un autre corps au premier plan qui occulte une grande partie de l'écran. On saisit alors des expressions magnifiques, comme cette fillette qui s'endort à cause du roulis, comme cette femme en plein fou rire, comme ce regard caméra tragique adressé par un homme dont on ignore tout. On attrape au vol ces pans de vie qui se déroulent sur quelques secondes.

Puis le train entre dans un premier tunnel, rapidement, et à sa sortie on a droit à quelques images abstraites sur des arbres qui défilent à toute allure, sur une mer aperçue de loin, le tout sur une musique bouleversante (Bach, p't'êt bien). Première étape vers une explosion de la lumière. Le deuxième tunnel donne lieu à un de ces plans que j'adule : une minute entière plongée dans le noir quasi-total, avec juste tout au bout du bout du bout de l'écran, ce petit point de jour qui s'agrandit tranquillement. Cameron peut aller se rhabiller avec sa 3D à la con : voilà un plan qui, avec toute la simplicité de la naissance du cinéma, prolonge le regard jusqu'au plus profond de la perspective. Au bout de ce deuxième tunnel, une lumière aveuglante qui emplit tout l'écran.

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Optimisme à tout prix ? Nouvelle variation sur l'espoir qu'on peut mettre en un peuple ? Ou au contraire adieu plein d'amertume au genre humain (c'est l'avant-dernier film de Pelechian) ? Image naïve de la Mort, avec cette imagerie connue du tunnel et de la lumière ? Legs d'un certain héritage à la jeunesse d'aujourd'hui (la plupart des passagers étant jeunes) ? Il y a tout ça dans ce petit film qui condense en quelques minutes une quintessence de quelque chose, qui utilise l'abstraction visuelle pour mieux enfoncer un peu plus les hommes et les femmes dans la vie, qui mèle une vraie tristesse désabusée à un fol espoir plein d'amour du genre humain. Pour l'audace de la chose, pour le manque total d'afféterie de la part de ce modeste cinéaste, pour la somme d'émotions que Pelechian arrive à brasser avec quelques images et quelques sons, je m'incline profondément devant le vieux maître arménien. Sur le cul, le Gols.

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