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30 avril 2010

La Chatte des Montagnes (Die Bergkatze) (1921) d'Ernst Lubitsch

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Chassé-croisé amoureux filmé sur un rythme endiablé, avouons qu'on ne s'ennuie pas une minute dans ce muet très speed voire parfois totalement déjanté - on reconnaît certains membres des Monty Python, bien maquillés (si, si) - et qui bénéficie d'un décor naturel somptueux - ces grandes plaines neigeuses immaculées - et surtout de décors en studio classieux : toute en rondeur et en volume, l'architecture de cette forteresse des montagnes est absolument mirifique, chaque détail, chaque sculpture, chaque bougeoir semblant avoir été dessiné pour l'occase. On passe son temps à se courir après dans cette oeuvre de Lubitsch, qu'il s'agisse de l'armée alpine après les bandits - et vice versa - ou des femmes après les hommes - et vice versa. La musique du DVD dans la collection Eureka pète en plus littéralement le feu et on est entrainé pendant 80 petites minutes sur un train d'enfer.

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Première véritable séquence qui laisse sur les fesses : celle où le lieutenant Alexis, par mesure de discipline, doit quitter son régiment pour en rejoindre un autre qui se trouve dans les montagnes; il laisse derrière lui toutes les femmes qu'il a conquises - le jour de l'enterrement de Clo-Clo, à côté, c'est du pipi de chat : po moins de 300.000 figurantes ont apparemment répondu à l'appel pour envahir le décor et c'est franchement impressionnant de voir toutes ces donzelles pleurer le départ de leur favori - il laisse en plus derrière lui une véritable chorale de gamins... On disperse la foule à l'aide d'une douzaine de petites souris blanches qui créent la panique, et la voiture d'Alexis de pouvoir quitter tranquillou cette horde féminine. Il ne va point tarder à briser à nouveau les coeurs : Lilli (Edith Meller), la fille du Commandant dans son nouveau régiment, prend immédiatement une option pour se marier avec lui; le seul problème c'est qu'en chemin, notre gazier a croisé l'immense regard de Rischka (l'incontournable Pola Negri), la fille du chef des bandits. Laquelle va réussir à lui mettre le grappin dessus ? On s'en fout un peu, mais c'est juste pour mettre un peu de suspens.

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Les bandits sont composés d'une demi-douzaine de Pieds-Nickelés, triés sur le volet, dont la tenue ou la mine est déjà tout un poème. Beaucoup aimé la séquence où ils feignent de mourir sous les balles de l'armée, ou lorsqu'ils se mettent à danser comme des dingues en écoutant la musique qui s'échappe de la forteresse, forteresse qu'à l'origine, ils sont venus attaquer : on est dans le burlesque bon enfant, et à ce petit jeu-là, Lubitsch s'en donne à coeur joie. Il n'en oublie point pour autant de soigner l'esthétisme de l'ensemble, tirant profit au maximum de ces décors démesurés (naturels ou non): une course poursuite d'anthologie entre Alexis et Rischka qui dégringolent d'escaliers disposés en "cascade", un rêve empreint de poésie lorsque Rischka s'imagine danser avec son Lieutenant (Lubitsch crée pour l'occasion d'étranges personnages-musiciens qui ressemblent aux enfants d'un Bisounours avec la fille du Bibendum Michelin), une véritable rivière de larmes qui se crée dans la neige quand Rischka abandonne son prétendant, une Rischka qui pète totalement les plombs en découvrant la chambre de Lilli (elle lui pique tous ses vêtements mais elle oublie de changer au passage ses énormes Mountain-Boots qui ne sont pas vraiment ultra sexy...). Lubitsch ne cesse de jouer également avec ses cadres, s'amusant surtout des caches tout en rondeur et en courbes. Cela crée certains plans assez particuliers, renforçant l'impression de folie douce qui s'est emparée de la "bande". Deux femmes pour un homme, donc, mais la Rischka va se révéler bonne joueuse en faisant exprès de se conduire comme un gros dégueulasse mal éduqué pour que l'Alexis revienne à sa Lilli. Bel esprit de sacrifice au final - bonne joueuse, la Rischka - et une oeuvre qui se savoure à la bonne franquette (comédie trépidante dans décors de grande classe) filant un véritable petit coup de fouet dès le lever.

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