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7 mars 2010

La Femme au Portrait (The Woman in the Window) (1944) de Fritz Lang

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Un très bon petit film noir du père Fritz Lang avec un Edward G. Robinson, tout alangui, qui à force de trop vouloir refouler ses désirs se verra donner une bonne petite leçon... Lang joue à merveille avec tous les codes du genre - femme fatale, meurtre, ambiance nocturne éclairée aux lampadaires, petits chemins déserts boueux... - et plus Robinson semble tomber dans tous les clichés du genre (comment réaliser le meurtre parfait, comment faire disparaître un témoin gênant...), plus Lang se joue, d'une certaine façon, du spectateur, qui pourrait trouver un tel comportement prévisible, voire guère "inspiré". Des cadres d'une précision absolue, des dialogues mitonnés avec soin où chaque mot semble constamment trahir les pensées secrètes de Robinson, et même si la conclusion n'est point d'une originalité folle, elle vient parfaitement boucler la boucle autour du doigt du spectateur qui s'est sûrement pris autant au jeu que le héros lui-même.

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Robinson, la quarantaine tassée, est un petit prof bien établi et pépère qui parle de meurtres en cours en évoquant Freud sur son tableau noir. Il passe la plupart de ses soirées avec un procureur et un docteur, et si ces derniers semblent toujours partants pour un peu d'aventure, notre ami Robinson paraît, lui, de prime abord, en être un peu revenu. Cela ne l'empêche point d'évoquer avec un petit sourire coquin le magnifique portrait de femme qu'il vient d'admirer dans une vitrine. Si jamais il venait à croiser cette femme que ferait-il ? Il la suivrait, diraient Jules et Jim, mais lui sait parfaitement que cela ne restera jamais que de petites discussions entre amis... Pas de bol, ah?, à peine sorti de son club, il tombe pratiquement nez-à-nez avec la donzelle : comme il s'agit d'une Joan Bennett avenante et peu farouche, difficile de résister et notre petit homme de la suivre en en croyant point ses yeux. Un verre, puis un autre dans l'appartement de la dame, hum hum, et puis un amant jaloux qui se pointe, un pauvre Robinson acculé à la faute et celui-ci de pointer à cet amant vénère un bon coup de ciseaux dans le dos... Pas de doute le film est lancé.

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Bien qu'en état de légitime défense, Robinson sent mal le coup et plutôt que de prévenir la police entreprend avec l'accord bienveillant de la donzelle de faire disparaître le corps : on a qu'à balancer le type dans la cambrousse, hein, qui pourra jamais remonter jusqu'à nous !? J'aurais fait poreil s'il y avait la moindre trace de campagne à moins de 200 km à la ronde autour de Shanghai. On sent qu'on a po affaire à un grand pro dans le style, mais on est de tout coeur avec lui : c'est quand même payer bien cher la ptite soirée rêvée. Il retrouve, malgré tout, dès le lendemain, ses petites habitudes et son pote le procureur qui s'occupe justement de la disparition du bonhomme. Robinson est fébrile, ses propos et son comportement n'ont de cesse de le trahir, et Freud de se fendre la pipe dans son coin. Tout se déroule malgré tout pour le mieux jusqu'à l'apparition d'un maître chanteur qui risque de tout faire capoter...

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Sans forcer son talent, Lang multiplie les séquences avec des miroirs ou dans de sombres couloirs où les portes ne cessent de s'ouvrir et se refermer, s'amuse à filmer Robinson - avec la donzelle - derrière des barreaux ou se prenant dans des barbelés, comme si les désirs inconscients de notre homme avaient finit par le prendre à son propre piège. L'image initiale de cette femme qui a fini par prendre vie semble l'avoir conduit sur un dangereux sentier et le mener tout droit dans le mur. Des désirs au désordre... C'est habilement mené, sans esbroufe, et en parfait artisan du genre qui sait faire monter subtilement le suspense - quelques jolis gros plans hitchcockiens sur des ciseaux, un stylo, un verre, un téléphone qui réjouiraient mon camarade -, Lang nous fait passer, eyes wide open, quatre-vingt dix minutes de plaisir piquant. Une véritable petite fenêtre cinématographique sur nos fantasmes qu'il serait bien bête de manquer - dont acte.      

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