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12 septembre 2009

Les Ailes de l'Espérance (Battle Hymn) de Douglas Sirk - 1957

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Moins inspiré que d'habitude sur ce coup-là, le Douglas. Même si force est de reconnaître encore une fois l'imparable génie visuel du sieur, Battle Hymn manque de ces grands moments de virtuosité auquel il nous a habitués : c'est du bel ouvrage, écrit sur mesure pour Sirk, c'est beau et plein de sentiments ; mais, sûrement à cause d'un scénario simpliste, peut-être à cause d'une certaine peur du spectaculaire (c'est une histoire vraie, et Sirk semble un peu effrayé à l'idée de trahir les faits), le film est d'un bloc, pas vraiment intéressant dans sa trame. Du coup, c'est comme si Sirk laissait tomber aussi le reste : c'est bien entendu très pro, mais aussi un peu passe-partout, voire même (surtout dans les premières bobines) très maladroit techniquement, ce qui est quand même un comble pour ce cinéaste.

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C'est encore une fois une histoire de rédemption qui dirige la trame : Dean Hess, durant la deuxième guerre, a bombardé un orphelinat, tuant des tas de nenfants innocents. Torturé par le remords, il va dans un premier temps devenir pasteur. Mais chez Sirk, le rachat n'est rien s'il ne passe pas par une action concrète (cf Magnificent Obsession ou Has Anybody Seen my Gal) : Hess va donc s'engager à nouveau comme colonel, dans la guerre de Corée cette fois, et tenter de changer son passé en sauvant cette fois des centaines d'orphelins des bombardements. On imagine bien ce qu'une telle histoire peut donner sous la caméra de Sirk : un grand mélodrame sur la foi, avec plein de personnages tout en noblesse d'âme, sur fond de toiles peintes aux couleurs vives. Eh bien, c'est ça, exactement : Rock Hudson, comme toujours très bon dans sa droiture et ses doutes, est LE Héros Américain, déifié systématiquement par une mise en scène qui le met toujours sur un piédestal (la caméra très souvent en contre-plongée sur lui pour augmenter sa grandeur) et par un scénario qui en fait une icône catholique parfaite. Honnête, courageux, amoureux de son épouse malgré les minauderies de son aide de camp, préoccupé par les petits mômes craquants qu'il prend sous son aile, il est l'homme parfait. C'est d'ailleurs là que la bât blesse : comme le personnage, le film est simpliste, d'un bloc, laissant peu de place au doute ou au danger.

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Dans une intro très rigolote, on découvre un vrai chef des armées expliquer que ce film est tiré de faits réels et a été placé sous le contrôle du héros, Dean Hess lui-même. Difficile donc pour Sirk de nuancer son personnage, de lui donner une quelconque profondeur, une quelconque ambiguité. Du début à la fin, on ne verra que l'aspect héroïque du personnage, et ça finit par lasser. Pas vraiment d'empathie cette fois pour le camp adverse, comme ce fut le cas jusque dans les barbares de Sign of the Pagan : le film est à 1000% américain, frôlant de très près la propagande (les enfants coréens entonnant d'une seule voix "Glory, Alleluia", c'est peut-être un chouille trop, Doug), bottant en touche tout signe d'altérité (le gamin qui apprend à macher du chewing-gum, grandeur de l'Amérique, comme un symbole d'une intégration à la culture yankee présentée comme obligatoire si on veut éprouver de la sympathie pour l'Etranger), toute ouverture à l'Autre. Du coup, la mise en scène semble suivre ce manichéisme de la trame : des couleurs trop tranchées, des scènes de bataille aériennes trop schématiques (on ne voit que les soldats américains, les "autres" n'étant montrés que comme des avions sans âme), un monde trop lisse alors même qu'on est dans les horreurs de la guerre. La séquence où le convoi d'enfants est bombardé par les avions ennemis tombe même dans une gênante esthétique spectaculaire : les petits forment une ribambelle de couleurs vives, et on regarde ça comme un feu d'artifice, sans ressentir le danger. Sirk évite les choses qui fâchent, et son film semble effectivement sous contrôle, victime d'une censure non-formulée mais bien présente.

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Restent bien sûr pas mal de bouffées d'émotions et quelques scènes très joliment menées (les dialogues mystiques avec un vieux sage coréen ou avec un militaire américain tourmenté par le remords), ça serait quand même le diable si Sirk n'arrivait pas à extirper de cette publicité pour l'Armée quelques bribes d'inspiration. Mais Battle Hymn manque trop de caractère pour rentrer dans la catégorie des grands films de son auteur.

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