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2 septembre 2009

All I Desire de Douglas Sirk - 1953

vlcsnap_2009_09_02_21h40m51s49Il y a décidément dans ces "petits" films de Sirk un charme incroyable, qui fait qu'on trouve presque plus d'attachement à ces oeuvres pas tout à fait abouties qu'aux grandes orgues du sieur. Bien que fanatique inconditionnel des mélos en couleurs de Sirk, je dois reconnaître que All I Desire a fait chavirer mon coeur avec non moins de force. C'est pas du tout parfait, c'est sûr, mais c'est presque justement dans cette fragilité, dans ce style qui se cherche encore un peu, dans cette timidité quand il s'agit de toucher aux grands sentiments, que Sirk est grand.

Barbara Stanwick est dans un rôle très proche de celui qu'elle tient dans There's Always Tomorrow : elle est celle par qui le scandale arrive, celle qui, involontairement, vient chambouler un ordre établi (la famille, le confort d'une petite ville tranquille, l'Harmonie Américaine). Ici comme là, la voilà qui déboule après des années au sein d'une famille établie ; ici comme là, elle va mettre en doute des sentiments qu'on croyait étouffés, immuables ; ici comme là, sa fragilité initiale va laisser place finalement à un caractère très fort de femme aux prises avec la lourdeur d'un passé qu'elle a renié. Sa composition est vlcsnap_2009_09_02_21h49m09s168encore une fois remarquable, c'est même étonnant de voir, dans cette femme finalement relativement peu photogénique (un physique de mère de famille banal), un tel charisme, et une aussi subtile façon de retourner son rôle comme un gant. Dans un noir et blanc étincelant, elle endosse chaque sentiment avec une sensibilité bouleversante. Son personnage, il faut dire, est particulièrement réussi : une pauvre strip-teaseuse de banlieue qui revient dans la ville qu'elle a quittée des années plus tôt, abandonnant mari et enfants, en se faisant passer pour la grande comédienne qu'elle aurait aimé devenir.

Sirk excelle à opposer à ce sombre destin une micro-vie domestique idyllique, avec jeunes filles en fleurs riant gaiement, petit môme fan de pêche, communauté soudée autour de la solidarité et de la bienveillance. Cette fois encore, on ne saura pas de quel côté Sirk se situe : celui de cette femme bousculée par le destin, emplie d'une tristesse et d'une noirceur impossible à supporter, ou celui de cette way of life tranquille et lumineuse représentée par cette famille mignonette. C'est là tout le talent du film, ne pas trancher, rendre poreux des mondes opposés, éviter le manichéisme, teinter de noir la douceur et de lumière la douleur, attiré par l'un et vlcsnap_2009_09_02_21h58m56s146l'autre équitablement. Avec une profonde empathie pour chaque personnage (y compris le méchant officiel, amant repoussé et violent justement à cause de sa frustration), Sirk filme au plus près de ses acteurs, déployant autour d'eux une symphonie de mouvements et de musique. Si comme toujours il utilise ses cadres en virtuose (un goût très net cette fois pour les plongées du haut des escaliers), il sait aussi se tenir tranquille quand il le faut, pour capter un geste (la femme qui retrouve la clé de sa maison cachée dans le pot de fleurs, 10 ans après), pour doper un dialogue (grande scène entre les deux prétendantes de Richard Carlson : "You're the one he needs" dit l'une, "But you're the one he wants" rétorque l'autre). On ressort encore une fois les yeux chargés, convaincu de la finesse éternelle de Sirk.

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