Rembrandt (1936) d'Alexander Korda
Laughton retrouve Korda après La vie privée d'Henri VIII pour une nouvelle biopic sur le peintre hollandais. Laughton fait encore valoir ses talents de transformisme parvenant, au départ, à plaquer sur son visage un éternel petit sourire ironique et gardant constamment dans les yeux un petit éclat; au fil des ans, son regard se ternit peu à peu avant que le Charles finisse avec une tête de génie un peu foufou. Après la perte de sa femme adorée Saskia - belle scène, en ouverture, à la taverne, où il se lance dans les louanges de cette femme unique en son genre et dans laquelle il retrouve toutes les femmes du monde -, le gars Rembrandt perd un peu le goût à la vie et continue surtout de dilapider son argent sans compter. Sa bonne, Geertje, tente de veiller sur le train de la maison et se rapproche, physiquement, de plus en plus du maître avant d'être évincée par une autre bonne plus jeune, Hendrickje - Elsa Lanchester, de grands yeux noirs dans un visage tout pâle - totalement dévouée à ce peintre bohème. On ne peut pas dire que Korda mégote au niveau du décor - grande place d'Amsterdam, les immenses moulins lorsque Rembrandt retourne vivre, peu de temps, chez son père - mais je dois reconnaître que cette reconstitution est loin de m'avoir complètement transporté... Laughton joue avec un certain charme ce personnage qui jette l'argent par les fenêtre et on veut bien croire qu'il trouve plus d'intérêt dans le visage marqué d'un clodo que dans les remarques de ses contemporains incapables de saisir la profondeur de sa peinture; fidèle à lui-même, il s'enfonce peu à peu dans la pauvreté sans s'en plaindre, refusant d'aller mendier auprès d'un quelconque prince; il conserve un esprit un peu d'"allumé" jusqu'au seuil de sa mort (il finirait presque par faire penser à la fin à Michel Simon... mince) et on est content pour lui qu'il ait pu vivre sa vie finalement comme il l'entendait, loin des contingences matérielles... Sur sa peinture, par exemple, le film reste très discret et le bilan sur son oeuvre reste bien maigre. Pour Laughton, donc, surtout...