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23 mars 2009

LIVRE : Aventures d'Arthur Gordon Pym (The Narrative of Arthur Gordon Pym of Nantucket) d'Edgar Allan Poe - 1837

aventures_arthur_gordon_pynnBon, d'accord, c'est une oeuvre de jeunesse, c'est super maladroit dans la construction, il y a de longs passages inutiles, d'accord. Il n'empêche que ce bouquin est très souvent sidérant, d'une violence morbide vraiment sans égale dans ce genre de littérature (même Stevenson ou Melville n'auraient pas osé une telle noirceur). Toute la première moitié du roman est une surenchère constante dans l'horreur, et Poe montre déjà sa maîtrise extraordinaire des ambiances fantastico-mortifères.

Le héros est d'abord enfermé dans la cale d'un bateau, dans le noir complet, avec un chien qui devient de plus en plus affamé et enragé : Poe en fait trois chapitres captivants, déclinant toute une palette de noirs et de peur, dans une variation de vocabulaire incroyable (gloire en soit plutôt rendue, d'ailleurs, à l'immense traducteur qu'est Baudelaire, comme un poisson dans l'eau dans cette atmosphère d'une noirceur totale). On est tenus par les c... par ce style hyper-précis, qui nous enfonce de plus en plus dans l'horreur, décrit par le menu toutes les étapes de la terreur. Les chapitres suivants vont continuer dans leur vision apocalyptique : le héros se retrouve abandonné avec trois rescapés sur un bateau privé de voiles, de gouvernail, de mats, bref de tout : un simple bout de bois ballotté par la tempête. La description de la survie de ces hommes abandonnés au sein du cosmos est horrible, Poe les entraînant dans une spirale de déshumanisation sans aucune issue : le sommet du roman, c'est cette description d'un bateau-fantôme croisé par hasard, jonché de cadavres et mené par un pilote mort depuis longtemps, que les mouettes grignotent goulûment. On est loin de la littérature pour enfants habituellement liée au genre du récit de voyage. C'est l'horreur.

On est alors d'autant plus déçu par la deuxième moitié du livre, qui abandonne presque complètement cette atmosphère, change de style de façon radicale et nous ennuie un peu : Poe s'y fait minutieux jusqu'à l'excès, et le voyage de Pym devient un récit scientifique certes intéressant, mais dénué de ces pics narratifs de la première partie. Nous est décrite par le menu une exploration du pôle sud, avec longitudes et latitudes au petit poil, et mise à part une attaque de sauvages rigolote, le voyage devient peu passionnant. Jusqu'à, quand même, un final totalement ouvert, très étrange, qui renoue avec le fantastique cher à Poe, et qui laisse sur une touche de mystère métaphysique bienvenu. On a quand même l'impression de deux livres en un : l'un puissamment apocalyptique, l'autre ennuyeux et baclé. Lisez la première moitié, c'est énorme. 

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