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Shangols
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30 novembre 2020

Muriel ou le Temps d'un Retour (1963) d'Alain Resnais

Toujours un peu de mal avec les Resnais du début des années 60. Si la réflexion qu'il fait sur le temps qui passe, le souvenir qui ne s'efface point, la présence insistante du passé, son poids sur le présent est tout à fait remarquable, si au niveau du montage, ce véritablement éclatement dans chaque scène, ces bribes des plans, ces multiples micro-ellipses dans le présent c'est impressionnant de maîtrise et d'originalité, au final, quitte à mettre un peu les pieds dans le plat, le film tombe un peu des yeux...

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On s'accroche pour reconstituer le fil de chaque histoire, de chaque personnage : Hélène Aughain (superbe Delphine Seyrig dont la voix m'enchante à chaque fois) vit au milieu des antiquités (le souvenir, quoi) et dilapide son temps au casino (ou "au gain", si vous préférez, mais elle perd tout à chaque fois... elle perd son temps, quoi...). Elle retrouve après plusieurs années son amour du début de la guerre, Alphonse, avec lequel elle passe le plus clair de son temps à se chamailler - ne semblent plus vraiment sur la même longueur d'onde, si jamais ils l'ont été. Ce dernier traîne dans les cafés à raconter semble-t-il des bobards avant que, sur le fil, le passé ne le rattrape... Ce dernier finira par fuir en Belgique, comme pour échapper définitivement à son passé. Il y a également le beau-fils d'Hélène, Bernard, de retour d'Algérie, torturé littéralement par son passé. L'image d'une certaine Muriel le hante; il passe son temps avec sa caméra à déambuler dans cette ville de Boulogne en essayant de capter le présent, le réel, mais apparemment en pure perte. Il parviendra au final par "régler son compte" au passé et prendra également la fuite. Il y a enfin comme autre personnage cette ville de Boulogne, totalement détruite pendant la guerre, filmée sous tous les angles, une ville où de nouveaux bâtiments, de nouveaux quartiers émergent. Resnais "éclate" volontairement ce temps présent comme si chaque personnage était enferré dans un passé, un passé d'ailleurs dont il est question dans la plupart des dialogues. La construction du récit est finalement très linéaire mais ce montage relativement heurté donne l'impression que le cheminement de la pensée de chaque personnage est un vrai dédale, comme s'il était difficile pour chacun de faire la part des choses entre la réalité et les événements du passé. C'est particulièrement ambitieux, Resnais conjugue l'art et la forme avec une maîtrise totale mais... c'est aussi parfois un poil déroutant et ennuyeux pour être tout à fait honnête... Vous pouvez me taper sur les doigts, j'accepte.  (Shang - 17/02/09)

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Arf oui, un Resnais période Hiroshima/Marienbad, c'est toujours assez peu supportable. Ce film, comme le dit Shang, est remarquable en tout point, mais sa construction cérébrale, son goût du labyrinthe, son abstraction, son intellectualisme très littéraire (on imagine bien Robbe-Grillet ou Butor en rédiger le scénario, mais non, c'est Jean Cayrol), tout ça vous assomme littéralement, et on préfère de beaucoup les films tout aussi sophistiqués mais ludiques de la période suivante. Tout a l'air signifiant dans Muriel ou le Temps d'un Retour, on sent bien que tout y est brillamment intelligent ; on est persuadé que Resnais veut vraiment dire des trucs. Mais tout est plombé par ce style jazzy tout gris, par ce jeu décalé des acteurs, par ce côté premier de la classe. A peine retire-t-on l'intéressante omniprésence de la guerre dans cette histoire, cette mystérieuse "Muriel" représentant non seulement un personnage concret du passé d'Alphonse, mais surtout tous les non-dits de l'Algérie, tout ce dont les vétérans ont toujours refusé de parler (la torture, les exactions). Le film tourne autour de ce qui est dit et surtout de ce qui ne peut pas se dire, Alphonse devenu l'archétype du gars cynique, taiseux, rongé par son mal intérieur. On s'étonnera donc peu qu'il soit aussi indicible et aussi difficile à aimer, tant tout ce qu'on voit à l'écran semble être l'écume d'une histoire beaucoup plus sombre et violente, tant tout semble être une façade, tant les personnages, dénervés et purement formels (et à ce jeu, Seyrig est effectivement la plus forte), semblent s'agiter pour dire sans dire tout en disant. Nous, pauvres spectateurs captifs de ce film enfermé dans son idée, dans la pure abstraction ou la pure philosophie existentialiste, on ronge son frein en les regardant s'aimer, s'engueuler et se perdre dans les méandres d'une non-histoire, conscients que le film est intelligent, mais peut-être trop "dispositif" pour toucher.   (Gols - 30/11/20)

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