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Shangols
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21 janvier 2009

The Mist de Frank Darabont - 2008

mist1_b23d0Bon, là, faisons simple : The Mist est le meilleur film d'horreur depuis The Descent, un film irrémédiablement voué à faire référence dans le genre. Le plus surprenant est qu'il nous vient d'un cinéaste pour l'instant sans intérêt. Avec ce film, il acquiert immédiatement mon respect le plus profond pour les siècles des siècles.

L'histoire est minimale : après une tempête, une mystérieuse brume envahit une petite ville. Une trentaine de citoyens se réfugient dans un supermarché, et découvre que ce brouillard renferme des créatures lovecraftiennes assez peu amènes. La survie s'organise. Dès le premier plan (l'affiche de The Thing), la référence est donnée : le Dieu Carpenter flotte sur tout ça, aussi bien celui de The Fog, modèle évident, que celui de Assault on Preccinct 13, qui revient sans cesse en tête. Et, ça me coupe une jambe de vous le dire, mais ce film est à la hauteur du modèle. Assumant totalement son statut de série B, The Mist déploie THEMIST_002dans un premier temps tous les motifs du genre : on rassemble une communauté dans un lieu clos, et on laisse mijoter. Darabont joue sur les caricatures, de la fanatique religieuse à l'inconscient de service, du héros malgré lui au jeune gars plein de bravoure. Les acteurs, dirigés en sur-jeu, sont un peu agaçants, mais c'est pour mieux nous suggérer un discours qui va littéralement imbiber le film : l'Homme est un loup pour l'Homme. Cette vision radicalement nihiliste de l'humanité va faire dériver le film vers une posture politique et morale tout simplement énorme. Le principe est connu, mais fonctionne ici en plein : enfermez des citoyens lambda dans un lieu, balancez-leur un danger autour, et regardez-les s'entretuer.

the_mist_visuel_2On va dire que j'insiste, mais The Mist est une sorte de film ultime sur ce qui a changé dans la notion de communauté après le 11 septembre. La brume qui envahit tout, rappelant immédiatement ce brouillard de poussière qui envahissait Manhattan, est un évènement qui va dévoiler les violences humaines les plus enfouies. "Effrayez les gens, et ils chercheront à tout prix un coupable", entend-on en substance dans ce film éminemment politique, qui traite du problème de la haine interne à la communauté avec une frontalité qui fait plaisir à voir. Le 11 septembre fait aussi bien sûr son apparition à travers ce personnage de barjotte fanatique de la Bible, qui parvient à inventer un nouveau danger au sein même de l'Humanité reconstituée dans le supermarché. L'enfer, c'est les autres, beaucoup plus que ces créatures gluantes qui dévorent petit à petit l'ensemble de la distribution. Dans les plans remarquables qui montrent ce groupe d'hommes face à l'inconnu blanchâtre qui s'étend de l'autre côté de la vitre, il y a quelque chose de métaphysique, la fin d'un monde, la fin d'un concept (le groupe). C'est sublime d'intelligence, et formelle et intellectuelle.

the_mist_5Carpenter est bien là, dans cette façon d'utiliser la série B pour proposer un acte directement politique. Le film est parfois gore, et joliment ma foi : pas mal de scènes sont impressionnantes, et Darabont arrive parfaitement à nous faire voyager de moments de bravoure en moments de bravoure grâce à son scénario au taquet, et à sa façon de toujours vouloir nous surprendre. On sent l'influence de séries genre Lost dans cette volonté de relancer sans arrêt l'action, de prendre garde à chaque personnage. Mais ce serait trop vite résumer le film que de vouloir en faire le seul spectacle qu'il est brillamment. Ce qui bouleverse le plus, ce sont ces scènes intimes, ces moments secrets où les hommes sont désemparés face à la violence et la bêtise de leurs concitoyens ; c'est le mystère quasi-divin que représente ce brouillard inquiétant, ces plans où des gens s'enfoncent dans le rien à la recherche d'une issue, d'une réponse. Quant aux 5 dernières minutes, qu'il serait criminel de dévoiler, elles sont ce que j'ai vu de plus radical depuis bien longtemps. Un twist final qui semble marquer un point de non-retour dans l'écriture de films gore : après The Mist, on aura du mal à redevenir politiquement correct. Béni soit Darabont pour ce film définitif et sublime.  (Gols 20/12/08)


18897681Je ne vais point répéter ce qu'a dit mon éminent collègue avec conviction. Bien aimé cette notion d'explosion du concept du groupe (à noter au passage que, dans la voiture, vers la fin, se retrouve assemblée une sorte de famille recomposée... nan, nan, je dis rien). Certes les bestioles charclent leur race (toujours eu peur des insectes, cela me conforte) mais le plus jubilatoire (quelque part) demeure l'illustration de cette capacité d'autodestruction, pour ne point parler, je tente le mot, d'homodestruction ("Il suffit de mettre deux types ensemble dans une même pièce pour qu'ils s'entretuent, c'est pour cela qu'on a inventé la politique et la religion" dit le petit employé rondouillard... mouais sauf quand la politique et la religion appellent à la vengeance...). On assiste à toute une série de morts un peu bêta : les types qui se motivent  entre eux pour ne point passer pour des ptites tafioles et qui finissent en charpie (bien joué les gars), les suicides en chaîne (po du jeu), le type courageux qui se fout lui-même le feu (well done) et surtout à mesure que la tension monte, la volonté coûte que coûte de trouver un bouc émissaire, de sacrifier quelqu'un en dehors de sa propre petite communauté, concept éminemment américain quand on est au fond du trou, ou, disons, au niveau zéro... L'évangéliste typiquement Stephenkingienne, je dois l'avouer, m'a un peu gonflé à la longue; elle a tout de même la chance de finir les bras en croix (une petite pointe d'ironie qui fait pas de mal, comme le grand brûlé qui vit ses dernières heures sous une affiche annonçant une promo pour le boeuf grillé... un détail croustillant). C'est parfaitement bien mené, peu de flingues, juste un, pour laisser plus de place à une boucherie antihéroïque des plus sanglantes (on pourrait évoquer une nuit des longs couteaux si l'expression n'avait point déjà servi) et bien sûr cette merveilleuse idée du brouillard, qui brouille tous les repères (physiquement et moralement), qui enfume littéralement les esprits, qui évoque à la fois toutes les menaces possibles ou l'immatérialité d'un Dieu quelconque qui n'apporte aucune réponse. Même si l'on joue sur des stéréotypes, dommage que le jeu des acteurs manque tout de même parfois d'une certaine finesse. Darabont signe en tout cas, de très loin, son meilleur film encore et toujours adapté, donc, d'un bouquin de King.  (Shang 21/01/09) 

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