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Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
22 novembre 2008

Rumba de Dominique Abel, Fiona Gordon & Bruno Romy - 2008

18934252_w434_h_q80Un grand plaisir de retrouver le trio infernal de L'Iceberg, d'autant que l'invention et l'imagination sont toujours au taquet. L'humour d'Abel et Gordon est indicible, indéfinissable, brasse plein de genres tout en trouvant une voie absolument unique. Comédie du remariage, burlesque tatiesque, cruauté billplymptonesque, duo à la Laurel et Hardy, galerie de bras cassés à la Jérôme Deschamp, tendresse à la Capra, il y a tout ça dans Rumba, références on ne peut plus nobles. Mais le film ne croule jamais sous ces modèles, et décline un style étrange, utilise un humour vu nulle part ailleurs.

18934251_w434_h_q80Les réalisateurs étirent chaque situation jusqu'à son non-sens, jusqu'au bout du bout, et une situation a priori banale (l'achat d'un pain au chocolat, un chien qui mange un beignet) sont capables en bout de scène de bouleverser complètement la trame. Ce qui fait la qualité du truc, c'est donc la surprise : on ne sait jamais où vont nous emmener les compères. Si on croit, au début, qu'on va assister aux aventures d'un petit couple fou de danse et à leur ascension dans les concours, on est très vite détrompé au bout de 20 minutes, le scénario nous embarquant dans une voie parallèle insoupçonnée. Chaque nouvel évènement est renversant d'improbabilité, d'autant que les auteurs ne sont pas en reste quand il s'agit de trouver des prolongations inattendues au moindre détail. Ca ne fonctionne pas 18934253_w434_h_q80toujours, et c'est vrai que les gags sont souvent moins drôles que dans L'Iceberg ; parfois, on voit ce que les auteurs ont voulu faire, mais sans que ça déclenche vraiment le rire : la faute à cette volonté justement d'explorer chaque idée jusqu'au bout, quitte à déboucher sur un échec. Le personnage du suicidaire, notamment, est mal campé, mal dessiné, peu intéressant, et ses scènes sont trop longues. Mais à côté de ces quelques hoquets dans le moteur, Rumba use d'une cruauté dans les situations qui force le respect. Très loin du politiquement correct, on est souvent bluffé par l'audace : le regard sur les enfants est très ironique, et il y a même une séquence burlesque autour de la maladresse d'une unijambiste assez sidérante.

18934254Et puis, il y a surtout la mise en scène, d'une rigueur incroyable au vu de la légèreté de l'ensemble. Le film est constitué à 99% de plans fixes, cadres hyper-mathématiques et impressionnants de contrôle, qui prouvent une nouvelle fois la maîtrise impeccable du trio. Du coup, les quelques mouvements de caméra sont des évènements qui impriment directement la rétine : un panoramique à 360° sur un couple qui danse (une des plus belles scènes de l'année, incontestablement), ou quelques subtils travellings latéraux le long de décors parfaits. L'écran se remplit de formes géométriques dans lesquelles les acteurs, malgré la folie douce de leurs actes, restent d'une rigueur impitoyable. Ca ne déborde pas, ça reste parfaitement cadré, et pourtant quelque chose d'anarchique jaillit de cette forme austère. L'utilisation des couleurs (costumes, décors, paysages), du bruitage, et surtout du corps des acteurs, finit de convaincre qu'on a affaire à de grands cinéastes, qui ne se contentent pas de faire rire, mais le font en connaissant pas coeur la grammaire du cinéma. Une comédie contemporaine superbement mise en scène, vous en connaissez beaucoup ?

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