Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
19 septembre 2008

Le Village des Damnés (The Village of the Damned) de John Carpenter - 1995

C'est faux de dire que ce remake n'est pas à la hauteur de son original, le fameux film de 1960 qui critiquait le communisme avec talent. C'est juste que Carpenter choisit une autre voie, un autre discours. D'accord, on n'est peut-être pas au niveau des grandes oeuvres directement politiques du maître : une première demi-heure peu intéressante, une certaine frilosité dans les scènes de pure horreur, des acteurs assez flous... Mais The Village of the Damned est quand même franchement agréable et délicieusement intelligent.

village_of_the_damned_kidsEn 1995, la guerre froide est froide, et JC choisit d'orienter son sujet vers d'autres attaques : à travers ce petit groupe d'enfants constituant une entité effrayante et solidaire, c'est au fascisme ordinaire qu'il s'en prend, celui qui menace l'Amérique et le monde de façon larvée et dangereuse. Les enfants tueurs sont des êtres privés d'émotion, préoccupés uniquement de survie, de prolongement de leur race. Affublés de cheveux blondissimes coiffés à la GI-Joe, le visage lisse et inexpressif, il ne s'occupent que de détruire l'ancienne race, celle des sensibles, des "empathiques", des disgrâcieux. Le grand talent de la mise en scène est d'en faire de parfaits bambins de magazine, correspondant totalement aux canons esthétiques en vogue : ils en sont d'autant plus affreux, et on sent bien le poids d'anarchie que Carpenter veut placer là-dedans. Les nouvelles générations n'existent que pour annihiler les précédentes, et le film le montre avec une tranquillité horrible. La photo du film, très nette, très hollywoodienne, est bien loin des clichés des films d'horreur actuels (filtres bleus et montage hystérique) : chez Carpenter, c'est connu, tout l'horrible se déroule dans le calme de l'Amérique profonde, dans la lenteur, dans la lumière du jour. Cette esthétique sert terriblement bien le sujet : le danger et la mort, pour ce coup-ci, ne sont pas irrationnels, ils apparaissent inéluctablement, naturellement, parce que c'est dans la nature de l'homme de vouloir progresser et dominer les autres.

18967416_w434_h_q80

Le choix de faire endosser le rôle de monstres à des enfants fonctionne superbement : petits génies régis par des codes incompréhensibles aux adultes, ils sont filmés dans tout le mystère de leur communauté, avec en plus cette idée géniale d'isoler l'un d'eux par les sentiments. Privé de sa moitié féminine (morte à la 1naissance), un des petits garçons acquiert une part d'humanité dont les autres enfants (en couple) sont dépourvus. Idée biblique (l'homme rechercherait désespérément sa part de féminité, d'où son malheur, relisez la Bible, ou sinon Le Roi des Aulnes) que John utilise avec une grande force visuelle, quand il filme ce groupe soudé terminé par cet être solitaire et incompris. C'est bien là le fond le plus étonnant du film : c'est de la communauté que vient le danger, du couple, du groupe, du consensus. Qui mieux que le grand solitaire qu'est Carpenter pouvait prendre en charge un tel sujet ? L'Amérique unifiée est renvoyée dans les cordes, et le grand John remporte au finish son combat contre le "pluriel".

tout Carpenter is bloody here

Commentaires
Derniers commentaires