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16 septembre 2008

LIVRE : Gatsby le Magnifique (The Great Gatsby) de Francis Scott Fitzgerald - 1946 pour la traduction

"C'est ainsi que nous avançons, barques luttant contre un courant qui nous rejette sans cesse vers le passé".

51VRSdo_ViLVoilà un petit moment que je gardais le roman sous cape pour enchaîner avec le film de Clayton. Fitzgerald, que j'ai - comme tout un chacun, non ? - dévoré dans ma jeunesse folle avant de me lancer dans la littérature américaine du XXème, délaissant sans état d'âme nos pâles auteurs français (j'en suis revenu... en partie), demeure un de mes fidèles compagnons de chevet - au sens figuré, soyons clair. C'est marrant en fait l'image trouble que l'on garde d'un livre, ce halo qui n'a finalement plus grand chose à voir avec ce que le livre raconte vraiment. Je gardais en tête l'histoire de cet homme, parti de rien, qui organise des fêtes spectaculaires chez lui, un parfum de romantisme et d'extravagances vaines, et j'avais fini par zapper toute la noirceur de l'histoire, notamment les multiples tragédies de la fin du roman, oublier tout le désespoir de cet homme qui reste en retrait de ses propres fêtes et qui n'a qu'une idée en tête : reconquérir son premier amour : "On ne fait pas revivre le passé? s'écria Gatsby incrédule. Mais bien sûr que si !"; bien sûr que non, mais l'essentiel semble peut-être de vouloir y croire. Idée de départ relativement classique que de placer en témoin de cette histoire un jeune homme encore mal dégrossi - mais qui tente de garder la tête froide jusqu'au bout, sans jamais cacher une certaine fascination pour cet homme dont tout le monde parle mais que personne ne connaît vraiment. Les retrouvailles entre Gatsby et Daisy sont d'un romantisme teinté de pathétisme, sont empreints d'une saveur nostalgique qui traduit parfaitement cette recherche - vaine - des temps des premiers émois adolescents : "Visiblement son état mental venait de passer par deux phases distinctes; il en abordait à présent une troisième. Comme suite à son embarras et à sa joie irraisonnée, il se consumait d'émerveillement devant la présence de Daisy. Il y avait si longtemps que cette idée le possédait, il l'avait vécue si totalement en rêve, il l'avait attendue, les dents serrées, pour ainsi dire, avec un degré d'intensité si inconcevable, qu'à présent, en pleine réaction, il cessait de fonctionner comme une montre qu'on a remontée trop à fond." Mais tout l'art de vivre de Gatsby est de croire que le ressort peut se tendre à l'infini alors que chacun sait, ben ouais, qu'à la fin, il pète. Après une période de folie douce qui fait se croiser tout le gratin de New-York dans le jardin de Gatsby, la maison perd de son éclat, Gatsby pensant pouvoir abriter son bonheur retrouvé des yeux de tous. Mais la tragédie guette - forcément mon bonhomme - et finira par exploser lors de cet été brûlant, le retour de flamme ne pouvant durer. Fitzgerald n'oublie point la cruauté qui se cache derrière toute chose et livre quelques descriptions qui font froid dans le dos - à l'image du personnage superficiel et violent qu'est Tom Buchanan, le mari de Daisy qui aura tôt fait de tourner la page sur les événements survenus lors de cet été -: "... quand ils eurent ouvert sa chemisette en la déchirant, moite encore de transpiration, ils virent que son sein gauche se balançait, décroché, comme un clapet, et qu'il était inutile d'écouter le coeur qui avait battu dessous". Gatsby demeure un roman magnifique d'une profondeur et d'une noirceur terribles derrière les paillettes.

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