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13 septembre 2008

Les Anges du péché (1943) de Robert Bresson

Premier long-métrage du Père Bresson qui nous convie à pénétrer dans la vie d'un couvent : je vous vois venir d'ici et vous préviens tout de suite, non, il n'y a pas de cascades. D'ailleurs, la mise en scène est également relativement "effacée", disons sobre, Bresson se permettant tout au plus quelques contre-plongées pour mettre en avant son héroïne lors d'instants clés. Le jeu des comédiennes, Renée Faure en tête (la gouaille parisienne de Jany Holt, par contre, ferait passer Edith Piaf pour une bourbonnaise) est particulièrement inspiré, ce qui tombe plutôt bien pour une histoire de rédemption.

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Pour recruter, les soeurs n'avaient point pour habitude de se rendre à l'ANPE, mais d'aller directement à la sortie des prisons pour tenter de sauver ces petites oisillonnes tombées du nid : chanter et coudre, rien de mieux apparemment pour faire passer les envies de meurtre ou de vol. Et pis arrive un jour une jeune fille enjouée, bien sous toutes les coutures, pétillante, qui semble avoir résolu, de sa propre volonté, de se 18677777couper du monde - on devine une déception et une désillusion amoureuse terrible mais on n'en saura guère plus. Cette dernière apporte résolument un peu de vie et de joie entre ces quatre murs austères, n'hésite point même à bousculer un peu la mère supérieure qui prend cette originale en affection - cela la change des soeurs bénies-oui-oui qui l'escortent. D'entrée de jeu, Soeur Anne-Marie se met martel en tête de venir en aide à une jeune femme, Thérèse, qui arrive au terme de ses deux ans en tôle. Cette dernière est plus sauvage qu'une vieille bique et est bien résolue à flinguer, à sa sortie, le type pour lequel elle est tombée. Ni une ni deux, pan pan, l'ombre du type s'écroule, et Thérèse de trouver refuge au couvent. Anne-Marie est toute à sa joie pensant avoir dompté le loup... Elle est ben naïve, ma foi. D'une part, la Thérèse, sitôt le voile sur la tête, a un peu de mal à supporter celle qui se veut son ange gardien. D'autre part, l'attitude de Anne-Marie qui virevolte sans cesse et semble suivre sa propre ligne de conduite ne tarde point à déclencher une vive jalousie chez les autres soeurs : sa fierté, son amour propre, sa volonté d'apporter coûte que coûte un peu de joie dérangent fortement ce gentil troupeau de moutons. Elles ne tardent point d'ailleurs à la battre froid lors de l'exercice de la "correction fraternelle" - une soeur va de porte en porte et les autres lui disent tout ce qu'elles lui reprochent : elles pourrissent grave la pauvre Anne-Marie, qui décide malgré tout de continuer d'aller de l'avant malgré les critiques : "Personne ne m'arrêtera" dit-elle, c'est la seule phrase que j'ai noté (avec "tout dans la vie est signe" mais j'ai pas eu l'occase), c'est le moment de la sortir.  Elle ne tardera pas à se faire exclure... Mais la gâte est têtue et est bien décidée jusqu'au bout à convertir Thérèse. Son retour sera "auréolé" de succès mais fatal...

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Intéressante, cette volonté de Bresson de suivre les pas de cette "illuminée", plus éclairée par son souci de sauver une âme, apparemment, que par une véritable foi religieuse. Elle sait qu'elle dérange, l'assume et n'hésite point à l'occasion à faire la lumière sur l'hypocrisie de ses comparses, plus occupées à plaire à la Mère Supérieure que par la volonté de faire rayonner leur bonté autour d'elles. Elle payera cher le prix de ces accusations, mais elle ira jusqu'au bout de la mission qu'elle s'est fixée, un sacrifice dénué de tout intérêt personnel, une sorte de Jeanne D'Arc rédemptrice, voire salvatrice d'âme. Pour un premier jet, le film est d'une belle tenue formelle - la pugnace et échevelée course dans la nuit de l'Anne Marie qui échoue sur la tombe du Père fondateur du couvent, son visage qui s'illumine par une sorte de feu intérieur, la dernière image et la magie des plans de Bresson sur les mains...- et beaucoup plus vivant paradoxalement que Le Diable, probablement, qui, rétrospectivement, avait un petit côté factice un peu plombant. Bresson est déjà sur les bons rails.

tout sur Robert : ici

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