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Shangols
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GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
17 août 2008

Le Masque de Cuir (The Ring) (1927) d'Alfred Hitchcock

ring3Plus à voir avec Rocky qu'avec Nakata ou Gollum, cette version cinématographique dédiée à la boxe signée du jeune Hitch reste méchamment prévisible malgré un rythme soutenu et une grande économie de cartons (à noter qu'un carton allemand se glisse sur une image en plein film... bizarre): un paquet de scènes inutiles, comme les 10 minutes avant le combat final, qui viennent plomber l'ensemble. Quatre coins du ring mais bis repetita, toujours une relation triangulaire, une femme un poil opportuniste entre deux hommes: comme ils sont tous les deux boxeurs, au moins on se dit qu'on saura pourquoi ils se battent. Le problème c'est que l'essentiel de la trame tient dans cette idée, et on a dès le départ tous les mouvements du film en tête: la femme se marie à un boxeur amateur (Jack) mais reste sous le charme du boxeur champion (Bob), celui-là devant se battre, dans tous les sens du terme, pour la reconquérir. Si l'amour est un perpétuel combat jamais gagné d'avance, Hitch tient sa métaphore mais ce n'est pas la plus légère. L'ambiance de fête foraine au début du film est cela dit relativement réussie ainsi que ces petits éléments qui reviennent comme des leitmotivs : le bracelet d'abord qu'enfile le Bob au bras de la coquette, image qui se superpose aux bras de Jack et du manager de Bob qui scellaient un accord (Jack devenant le sparring-partner de Bob): il s'agit d'un véritable pacte avec le diable et ce bracelet d'apparaître ensuite souvent comme l'élément perturbateur dans leur union; quand Jack enfile la bague au doigt de sa femme, ce bracelet glisse le long du bras de celle-ci: il restera une menace constante dans leur mariage, comme la présence sournoise du Bob dès que Jack a le dos tourné. Il y a aussi un petit jeu avec le champagne, breuvage qui concentre en lui toute la rancœur de Jack (comme si la promesse d'un avenir radieux et pétillant avec sa belle tournait toujours à l'aigre): alors qu'il veut fêter une victoire, ilring débouche une bouteille de champ avec des amis mais veut attendre sa femme avant de commencer à boire: elle ne rentrera qu'au petit matin, les verres restant comme deux ronds de flan sur le plateau... Lorsque Bob lui offre une coupe lors d'une soirée, il verse cette dernière par terre, avant de lui mettre sur la figure... enfin c'est ce même liquide (dont l'asperge son entraîneur, oui on est bien en 1927) qui lui redonne courage sur le ring dans le combat final alors qu'il est au fond du trou: "le champagne, la boisson de la revanche!"... Bon que dire enfin si ce n'est que les danses dans les années 20 feraient passer un pogo sur une chanson de Nirvana pour un concert de Pascal Sevran lors d'un congrès du parti communiste chinois. Ah oui les Années Folles, y'a pas d'autres mots.   (Shang - 16/10/07)


Je trouve mon camarade bien injuste avec ce très beau film de Bouddha période muette. C'est certainement moins inventif que The Lodger, mais il y a quand même environ 20000 idées visuelles toutes plus craquantes les unes que les autres et qui rendent le film franchement passionnant.

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On a l'impression d'assister à une oeuvre écrite d'un trait, extraordinairement homogène et tonique. C'est sûrement dû à la superbe construction de l'ensemble, quasi-mathématique, Hitch se livrant à une variation sur le thème des figures géométriques avec une discrète virtuosité. Au carré du ring répond le cercle de l'anneau (the ring) offert par l'amant, ainsi que celui de la bague de mariage. Ce motif circulaire se retrouve dans la structure même du scénario, bâti en boucle : un homme aime une femme, la perd, puis la retrouve, en une sorte de "mélodrame du remariage" parfaitement clos sur lui-même. Le film multiplie les apparitions de ces formes géométriques (auxquelles il faut ajouter le triangle amoureux), en particulier le cercle qui est présent quasiment à chaque plan. Il est le piège obsessionel dans lequel s'enferme le héros, et qu'il va constamment retrouver dans son champ de vision (verres de champagne, punching-ball, etc.) Le but du jeu va être de sortir de ce cercle et de retrouver le mouvement horizontal ou vertical, symbolisé ici par une affiche de boxe qu'il va falloir gravir pour reconquérir l'être aimé.

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Mon gars Shang signalait que le film comportait peu de cartons, et effectivement c'est bien là une des grandes qualités de The Ring : Bouddha trouve systématiquement des équivalents visuels pour combler le manque de dialogues, et réussit brillament chacun de ses effets. C'est, par exemple, des panneaux annonçant le nombre de rounds, de plus en plus poussiéreux à mesure que le combat dure, pour symboliser la difficulté du match ; c'est un tas de billets d'entrée au match qui disparaît en roulant (en cercle...); c'est un piano qui se tord sous un effet optique dû au délire amoureux du héros; c'est l'utilisation de la caméra subjective pour plonger le spectateur au coeur du combat... Hitch utilise avec maestria et amour toutes les techniques possibles pour pallier au silence, et on le sent d'ailleurs avide de passer au parlant (les acteurs prononcent parfaitement les mots, qu'on peut lire sur les lèvres, comme le "I won" libérateur du personnage principal). Il est vrai que la partie précédant le match est un peu moins inventive, Hitch s'enfermant dans des scènes un peu trop "utilitaires" pour être vraiment intéressantes ; mais pour ces 10 minutes-là, on a droit à un véritable festival d'inventions.

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Ajoutons un génie total pour planter des atmosphères, notamment la fête foraine du début, pleine de petits détails totalement anecdotiques qui plantent l'ambiance : on y aperçoit déjà un flic un peu ambigü, qui rigole aux farces de deux gamins mal élevés avant de se souvenir de son statut. Le match final, dont Bouddha fait monter le suspense en prenant tout son temps, est également au taquet, à commencer par cette succession de panneaux indicateurs montrant les spectateurs se ruer sur toutes les places libres (on retrouvera le même effet dans I confess).

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Et puis les acteurs sont parfaits, surtout cette actrice brune (l'équivalent du scandale pour Hitch) éminemment salope qui endosse un rôle épineux avec une grande finesse : Bouddha la filme plein cadre, dans toute sa vénalité. Les femmes ne sont d'ailleurs pas à l'honneur dans ce film, amoureuses de celui qui gagne, dédaignant celui qui perd. Les autres acteurs sont à l'unisson, et on retrouve avec plaisir la fine équipe de Hitch : Carl Brisson, cocu pour la première fois (il le sera à nouveau dans The Manxman plus tard), joue de ses muscles et de son visage d'ange avec une grande sensibilité ; Ian Hunter est parfait en prequel du dandy fatal récurrent dans le cinéma d'Hitchcock; et l'immense Gordon Harker est toujours aussi poilant dans le rôle de l'entraîneur : il a deux moments de gloire, l'un quand il avale une choppe de bière grosse comme une barrique en 10 secondes, l'autre quand il mime en trois mouvements tout le cocufiage de son pote aux invités de la fête. The Ring est un grand film spectaculaire et sensible.   (Gols - 17/08/08)

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