Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
31 juillet 2008

Du Jour au Lendemain (Von Heute auf Morgen) de Jean-Marie Straub et Danièle Huillet - 1996

duj068Ah enfin un film abordable dans l'oeuvre du couple infernal ! On respire pas mal avec cet opéra taquin comme tout écrit par Schoenberg et filmé dans la rigueur coutumière. D'abord parce que l'opéra lui-même est franchement formidable. C'est certes encore une fois la musique totalement déstructurée et parfois pompière du gusse, mais cette fois avec une dose d'humour et d'invention qui emporte le morceau. Il y est question de la difficulté d'être moderne, à travers la dispute d'un couple sur la fidélité au cours d'une nuit blanche. La modernité est dans le texte (les deux envisagent un moment duj001l'amour libre, le divorce), mais surtout dans le construction même de la musique, trouée ça et là par des apparitions très triviales d'éléments extérieurs : ça va d'une enfant annônant son texte en désaccord avec la musique, à des sonneries stridentes de téléphone, et jusqu'à un employé du gaz qui vient se faire régler sa facture. Schoenberg se moque de lui-même, de la musique, et de la modernité, et livre un opéra enlevé et rigolo.

De l'humour chez les Straub, c'est comme une poule devant un mégot : quelque chose a du mal à passer au début. Le filmage est d'ailleurs toujours duj016aussi rigoureux, et ce n'est pas dans la mise en scène qu'on trouvera la moindre trace de légèreté. Ca commence par un panoramique (le même que d'habitude, et le seul mouvement de caméra du film) sur un orchestre jouant devant une salle vide ; ça se poursuit par une image fixe de 2 minutes sur un graffiti ("Où gît votre sourire enfoui ?"). Le reste sera constitué de plans fixes sur les interprètes dans un décor bourgeois de théâtre. On a vu plus poilant. Pourtant, les Straub parviennent à trouver une certaine drôlerie, dans la direction des comédiens par exemple, très second degré, ou par cette très intelligente complicité avec le public : de nombreux plans montrent des pans de décor vides, et attendent patiemment que les acteurs rentrent dans le duj081cadre, inventant une sorte de "suspense formel", malgré l'austérité de l'ensemble. Von Heute auf Morgen se suit finalement avec un plaisir d'esthète, jusqu'au final touchant de la part du compositeur le plus barré du début du XXème : être ou ne pas être moderne, après tout qu'importe, du moment qu'il y a l'amour... et qu'on a suivi sans broncher cette oeuvre vibrante de modernité. J'étais à deux doigts de laisser tomber les Straub : je leur laisse encore leur chance.

Tout Straub et tout Huillet, ô douleur : cliquez

Commentaires
Derniers commentaires