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21 juillet 2008

Tous en Scène (The Band Wagon) de Vincente Minnelli - 1953

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Je fais toujours plus ou moins la grimace devant le jeu un peu terne de Fred Astaire, mais là, force est de constater qu'on est dans le haut du haut du panier en matière d'entertainment hollywoodien. The Band Wagon est si léger, si coloré, si évidemment fait dans la joie, qu'il efface complètement la fadeur des acteurs. On regarde l'écran exploser avec une joie de gamin, et peu de comédies musicales savent aussi bien vous replonger dans le mystère de l'enfance. C'est sûrement ça qui touche dans les grands "musicals" : cette plongée dans ce qui fait l'innocence des premiers temps. Dans The Band Wagon, tout est possible, les lois de l'espace, du temps et de l'attraction terrestre sont abolies, et l'émotion vient justement de ce mépris des basses choses du quotidien pour le remplacer par la joie de la magie.

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Pourtant, le scénario du film est absolument dénué d'intérêt, et curieusement dénué d'enjeu dramatique. Certes, les relations entre Astaire et Charisse commencent comme il se doit dans la tension ; mais on ne se fait aucun souci quant au baiser final, qui arrive d'ailleurs sans aucune mésaventure. Certes, le spectacle monté par la troupe est d'abord un four total ; mais il devient un succès foudroyant sans jamais que Minnelli n'invente un quelconque danger qui le mettrait en péril. On est donc dans la légèreté la plus complète, le film se débarrassant de tout rebondissement scénaristique pour se concentrer sur les parties dansées et chantées. C'est un peu la limite : on aurait aimé que les personnages existent un peu plus, qu'ils aient un peu plus de soucis, afin que le happy end arrive comme un retour à l'harmonie plutôt que comme une conclusion assez plate.

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Mais la mise en scène des parties musicales est si parfaite qu'on oublie bien vite le vide de l'ensemble. Fidèle à son style, Minnelli utilise toutes les couleurs possibles pour en mettre plein la vue, sature son écran de mouvements, de sourires Colgate et de robes élégantes, et on a parfois l'impression d'un film en 3 dimensions, tant chaque détail de l'arrière-plan bénéficie d'une attention maniaque. La grande réussite de ces scènes réside dans le fait que tout est filmé en tant qu'objet "théâtral", en tant que carton-pâte, en tant que "convention" scénique, et en même temps tout "fait cinéma" : on se rend vite compte que les chorégraphies ne rentreraient pas dans un espace scénique, que les mouvements de caméra sont beaucoup trop vastes pour tenir sur une scène de théâtre, et pourtant, Minnelli ramène constamment les choses dans la superficialité d'un décor de music-hall (les acteurs se heurtent au bord de scène, les décors changent à vue, etc.). Du coup, le style est troublant, partagé entre convention théâtrale et immensité cinématographique. La séquence finale, parodie de film de gangsters, est d'une virtuosité époustouflante, non seulement dans les danses, mais surtout dans cette frontière indécise. "The stage is a world, the world is a stage of entertainment", disent les shakespeariennes paroles de la chanson principale : cette déclaration de principe irradie l'ensemble du film.

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Assez drôle d'ailleurs de deviner sous les paillettes une critique bon-enfant du théâtre intello. Le metteur en scène veut d'abord produire une adaptation de Faust en comédie musicale ; mais devant le peu de succès, on revient bien vite à l'artificialité de la grande époque Broadway dénuée de fond et de sens, d'où succès. Le fait de faire de Fred Astaire un vieux de la vieille légèrement dépassé confirme l'aspect presque crépusculaire du scénario : Minnelli déclare son amour au divertissement à l'ancienne, et renvoie gentiment le théâtre contemporain dans les cordes. D'un vide abyssal, The Band Wagon est pourtant un grand moment de spectacle. Classique, définitivement.

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Commentaires
G
Moi je trouve ma chronique absolument brillante et à deux doigts du génie pur, Mitch, que lui reprochez-vous ?<br /> <br /> Le machino qui passe ? mmm, bien sûr, pas vu, donc pas d'opinion, mais merci pour l'anecdote qui permettra de revoir ce petit bijou avec un oeil acéré.
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T
Sidération sur le vide abyssal de cette... hum... chronique... Vous savez faire mieux, Gols. <br /> <br /> Enfin, non. Peut-être pas sur les comédies musicales où votre esprit d'analyse part souvent en vrille pour rejoindre celui de Drucker que vous citez ci-dessus. <br /> <br /> <br /> <br /> Mais c'est pas pour vous complimenter ainsi que je viens ça. <br /> <br /> C'est pour une question. <br /> <br /> Dans la séquence du numéro "Louisiana Hayride" (cf. photo 4 de la... hum... chronique) , à environ 1h20 de film, il y a un truc très très strange....<br /> <br /> On remarque ça à la énième vision - c'est mon cas- et même en le sachant, des fois, le lapin vous file sous le nez...<br /> <br /> Bref, dans la partie finale dudit numéro musical, un homme passe.... <br /> <br /> Ouais. Il passe.<br /> <br /> A gauche de l'écran. Un machino de la MGM, d'un certain âge, juste derrière le bras du mec à la chemise à carreaux rouges. Le machino vaque. <br /> <br /> Accidentel ?<br /> <br /> Voulu ? <br /> <br /> Chaque fois je me pose la question... <br /> <br /> Et vous, cinéfous de la bloguerie ? Quel est votre avis ?
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