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23 mai 2008

Faits Divers de Raymond Depardon - 1983

LBA_DVD_02240_vig_127C'est bien de regarder tous les documentaires de Depardon, parce que ça finit par dessiner un seul et unique "scénario" qui se suivrait de film en film. Les branquignols de Faits Divers, on les retrouve en effet dans 10ème Chambre, dans Urgences, voire dans San Clemente : les mêmes déviances, la même folie douce, les mêmes soucis, la même impression de misère quotidienne. Comme si la carte de France dressée par Depardon montrait une population complètement livrée au désespoir, à la violence, à la solitude, à la misère. Comme d'habitude, il se fait ici témoin discret et implacable des centaines de petits riens qui plongent de pauvres gens dans le malheur, et le moins qu'on puisse dire, c'est que la vision qu'on en tire de notre cher pays n'est pas très réjouissante.

K8045_5_galerieC'est souvent pas grand-chose, ces interventions policières quotidiennes : des disputes de couples, des mecs qui ont un peu abusé des acides, une petite vieille qui pète les plombs... Ce ne sont presque pas des "faits divers", il n'y a pas de conséquence terrible, pas de pathos ; Depardon montre d'ailleurs à la perfection la vie qui continue à filer autour de ces mini-drames, les passants intéressés deux secondes par l'"évènement" avant de passer leur chemin. Un plan, notamment, est particulièrement génial : une gamine misérable, libérée du commissariat après qu'on l'ait choppée en train de piquer des porte-feuilles, et qui disparaît dans la foule parisienne, aussitôt remplacée à l'écran par le camion de la fourrière : un destin minable qui rejoint d'auters destins minables, un malheur qui se mêle aux autres sans que quoi que ce soit n'en soit K8045_3_galeriebouleversé. Le pire, c'est que le film est souvent drôle, avec le recul des années : quand on voit ces flics gentils en tee-shirts bleus et à l'accent parigot ("bon, ménnan ça suffit, ce cirque, hein !"), on fait forcément la comparaison avec nos Robocop d'aujourd'hui ; quand on les voit se battre contre une mémé complètement déclaftée ou affronter quelques plaintes incompréhensibles, on sourit à cet esprit "service public" (le mot est prononcé sur la fin par un gradé qui part en retraite) complètement disparu. Mais la plupart du temps, Depardon préfère la tragédie "tranquille", ce désespoir latent qui jonche les rues parisiennes : racistes ordinaires, sans-logis moribonds, drogués sanguinolents... jusqu'à deux scènes finales glaçantes : un suicide et une femme qui s'accroche au fourgon de police pour sauver son mec embarqué (elle s'éclate la tronche sur le trottoir).

K8045_2_galerieToujours à bonne distance, c'est-à-dire le nez dessus, Depardon traque, fouille, rendant sa caméra d'une mobilité surprenante compte-tenu du challenge de son projet (filmer des drames sans en déranger le déroulement). Un montage au taquet, qui sait exactement dégager tout l'aspect dramatique d'une séquence par le simple art de la coupe, finit de convaincre. C'est toujours aussi bluffant.

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