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20 mai 2008

Moi, Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma soeur et mon frère... (1976) de René Allio

Entièrement joué par des gens de la campagne bien de "cheu nous" - enfin plus de chez B**t**n que du Bourbonnais -, voilà un film que Bresson n'aurait sûrement point renié. Comme le dit un des figurants dans les making-off, il est peut-être plus facile pour un paysan d'être acteur que pour un acteur de manier correctement une fourche... C'est pas faux (uniquement pour le jeu de mot). Il faut reconnaître que cette reconstitution a beau relater des événements des années 1820-1830, on plonge les yeux fermés dans cet univers campagnard.

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Allio commence par nous montrer les cadavres qui baignent dans leur sang et on se demande comment un gars a pu arriver à une telle barbarie. Témoignages du voisinage et des gens qui l'ont côtoyé, on aurait tendance à croire qu'on a affaire à un simple d'esprit - personnage totalement enfermé sur lui-même, regardant constamment ses pieds, invoquant le diable ou les fées et crucifiant des grenouilles pour le plaisir -  jusqu'à ce que Pierre Rivière himself prenne la plume et nous raconte par le menu toute l'histoire. Le gars s'excuse en introduction pour son écriture grossière et on est rapidement bluffé aussi bien par son sens de l'analyse que par ses références, qu'il cite précisément des passages de la bible ou des livres d'histoires qui fleurent une évidente misogynie. Pierre Rivière est loin d'être idiot - ce serait bien trop simple - et son récit ne tarde pas à glacer le sang : il revient précisément sur la rencontre de ses parents, et de décrire sa haine viscérale pour sa mère, une vraie harpie, qui pourrit complètement la vie de son père. Pendant environ deux heures, on entre littéralement dans ce monde de dur labeur, de pauvreté mais aussi plein de pugnacité : les constantes disputes et réconciliations (qui semblent invariablement se solder par la naissance d'un enfant) entre ses parents feraient passer le couple du Chat de Granier-Deferre pour deux gentils tourtereaux. La volonté de se sacrifier de Pierre Rivière en commettant ce crime monstrueux pour libérer son père du joug de cette femme est à la fois poignante et pleine d'une conviction abyssale... qui laisse pantois.

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La mise en scène d'Allio est sèche comme une bouse de vache en été, chaque personnage ajoute au film une touche d'authenticité évidente, le ton est aussi frustre et radical qu'un Pialat à l'ancienne. Même si l'image un peu vieillie est proche de celle d'un téléfilm vintage, on suit cette histoire difficile, impressionné par sa sincérité et son réalisme, tout en pénétrant dans la mécanique psychologique de ce Rivière peu tranquille. Du beau monde à la collaboration de l'écriture (Foucault, Bonitzer, Toubiana) et deux assistants-réalisateur de choix - Mordillat et Philibert - ce dernier étant revenu récemment dans un docu sur le tournage de ce film. Ardue mais prenante, l'histoire d'un crime vécu de l'intérieur...      

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Commentaires
S
Oui, ce commentaire sur ce film me semble juste et pertinent, la bouse est forcément plus sèche en été alors qu'elle est disons glacée en hiver. C'est le côté rigide de la chose qui m'a fait faire ce faux pas. Espérons que ce soit du pied gauche.
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G
Les bouses de vache, en hiver, ne sont pas sèches, si ? Bast**n, toi qui es du coin ?
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