Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
14 septembre 2014

J'ai été recalé, mais… (Rakudai wa shita keredo) (1930) de Yasujiro Ozu

I_Flunked__ButIl s'agirait presque d'un préquel de J'ai été diplômé, mais... (j'explique pas pourquoi, hein?) qui paradoxalement est presque plus optimiste dans le ton que ce dernier. Petite plongée dans l'art du pompage en classe, avec nos étudiants qui écrivent leurs cours sur leur chemise. Cela se révèlera fatal pour notre pauvre étudiant lorsque, le jour de l'examen final, sa chemise sera malencontreusement envoyée chez le teinturier. Son échec n'est po grave en soi vu que ses camarades, diplômés, ne trouvent pas de taff. On retrouve en fond, dans la chambre d'étudiants, une affiche de ciné (après un film d'Harold Lloyd dans le précédent film, Charming Sinners de Robert Milton) qui fait écho aux petits péchés de l'étudiant qui, en contrepartie, est le seul à flirter avec la voisine de palier. Ozu filme magnifiquement la séquence où nos deux tourtereaux se retrouvent après les examens, filmant séparément tantôt l'un debout, tantôt l'autre assis (et vice versa) avant qu'ils ne se retrouvent, dans le même cadre, ensemble. Ozu nous gratifie de quelques travellings sur ses étudiants qui patientent au dehors ou qui planchent en classe ainsi que ses fameuses scènes de groupes où nos étudiants improvisent, à 5 ou 6, quelque pas de danse ; il y a aussi ce plan parfaitement réglé lorsque l'étudiant sort de l'université avec un compagnon d'infortune, les deux marchant au pas jusqu'à se retrouver foulant le tapis au pied de l'escalier. Quelques signes plus tragiques font leur apparition comme cette corde qui pend au plafond ou ces ciseaux avec lesquels l'étudiant semblerait vouloir se trancher la gorge, mais ces mauvais présages sont vite détournés, les ciseaux servant finalement pour les ongles de pied. Un certain "esprit de groupe" contrebalance les petits soucis quotidiens, parfaitement illustré par la scène du repas où les convives mangent au même rythme que l'étudiant recalé : lorsque celui-ci décide finalement de se goinfrer pour se redonner du courage, les autres calquent leur gestes sur leur compagnon. Ozu n'a mis qu'une semaine (... Gosh) pour tourner son film et l'on sent déjà l'oeil du maître derrière chaque cadre et micro-mise en scène. Jamais recalé le Yasujiro.   (Shang - 16/04/08)


 Flunked12

Décidément bien emballé par la période muette de Ozu que je connaissais bien mal, j'en ajouterai une louche sur ce petit film entièrement consacré à la jeunesse, et qui arrive à exprimer quelque chose de rare : ce que c'est intrinsèquement que la camaraderie, à savoir un système de codes reservé à un groupe, complètement opaque aux autres. Ici, dès qu'un membre du groupe propose une posture, une démarche, un début de rythme, tous les autres enchaînent immédiatement avec un bel ensemble, avec comme résultat de minuscules danses codées, des chorégraphies qui unissent nos poteaux dans un même univers qui n'appartient qu'à eux. Ozu filme ça avec ce qu'il faut de distance et de proximité mélées : amusé et assez nostalgique, il enregistre le mystère de ce groupe, précisant les liens solidaires (et crypto-gays, si si si) qui existent entre eux. Grâce à ça, il capte un peu ce qui fait l'essence de la jeunesse, et touche du doigt la courte période qui fait passer de l'enfance à l'âge adulte. C'est pas grand chose, un gars qui mange un loukoum avec gourmandise, un petit jeu de loterie à la con, un spectacle d'ombres chinoises offert à la gorette du coin, mais ça en dit beaucoup : les personnages du film sont à cheval sur deux âges, deux manières d'être au monde. Symbolisé par cette fameuse licence qu'on obtient ou pas, le délicat passage à l'âge adulte est vu comme une nécessité un peu douloureuse (la dernière réplique : "finalement on aurait dû attendre un peu avant d'avoir la licence, vu le monde pourri qui nous attend maintenant", traduction personnelle), vision qui plonge le film dans une mélancolie douce-amère : le monde est dur, jeune, profite un peu des roses de la vie avant de l'affronter.

Flunked1

Pour le reste, ce qu'en raconte le Shang est parfait. Tout en modestie et pourtant diablement au taquet techniquement, Ozu réalise un film joyeux et drôle, avec ces scènes d'examens vraiment bien montées et assez marrantes, ces séquences de bluette amoureuse charmantes, cette sophistication de mise en scène qui se cache toujours sous un masque de simplicité. On aime cette façon de faire traîner les plans juste un peu plus pour capter un dernier détail rigolo (les cinq mecs qui vont à l'examen avec une démarche clownesque), ces travellings souples, cette façon très précise de placer les acteurs dans le cadre et de rendre vivante une atmosphère. C'est parfait, alors que ça ne se veut jamais chef-d'oeuvresque, alors que ça s'assume toujours comme un divertissement. Mention très bien.   (Gols - 14/09/14)

class

sommaire ozuesque : clique là avec ton doigt

Commentaires
Derniers commentaires