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5 avril 2008

Signes de Vie (Lebenszeichen) (1968) de Werner Herzog

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Premier long métrage du père Herzog et déjà - si jeune le bougre - un grand sens de l'image (magnifique noir et blanc sous le cagnard grec) et de la bande sonore (musique traditionnelle qui se déploie sur de longues séquences); mais surtout, il y a en germe, tout un pan de la thématique de son oeuvre, c'est-à-dire une réflexion sur le sens de la vie (rien de moins que ça) et surtout le point de rupture chez un individu, autrement dit la folie ou le pétage de plombs. Adapté d'une nouvelle du romantique Allemand Achim Von Arnim, L'Invalide fou (1818) (cela réveille de lourds souvenirs pleins de somnolence lors d'un cours de litté comparée... passons), le film d'Herzog, situé en pleine seconde guerre mondiale, en est une version moderne particulièrement fascinante à décrypter (enfin, à essayer de comprendre, on va dire).

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Le soldat Stroszek (eh ouais déjà le même nom), après avoir été blessé, se retrouve confiné dans une forteresse avec deux autres soldats ainsi que sa nouvelle compagne, l'infirmière grecque qui a veillé à son rétablissement. Le constat s'impose vite, il n'y absolument rien à foutre, si ce n'est surveiller un dépôt de herzog_werner_lebenszeichen_pl1poudre qui n'intéresse personne. On se croirait presque dans le Désert des Tartares sauf que là, il n'y a même pas à craindre une attaque ennemie... Becker, le soldat cultivé, en profite pour étudier les inscriptions grecques sur d'anciennes pierres. Meinhard, le gros bourrin, ne pense qu'à prendre au piège des cafards, à hypnotiser des poules, une fascination pour la torture et l'ordre, particulièrement lourde de sens dans ce contexte... Stroszek, lui, se laisse de plus en plus envahir par la nonchalance, la passivité, et il erre plus qu'il ne rôde dans les rues de ce petit village de Crête à la recherche d'on ne sait quoi, si ce n'est peut-être de lui-même; certes le tempo du film est lent, mais cela convient parfaitement pour nous plonger dans cet état de torpeur dans lequel tombent ces soldats sans guerre (on repense alors aux deux précédents courts d'Herzog, la Forteresse Deutschkreuz où des pseudo militaires partaient à la recherche d'ennemis pour donner un sens à "leur jeu" (hum) et Derniers Mots, déjà situé en Grèce où la répétition des dialogues frôlait l'absurdité). Sans dévoiler le fil du film outre mesure, Stroszek va commencer à péter vraiment un câble lorsque surplombant une vallée d'éoliennes (un petit souvenir de Cervantès, nan ?), il va se mettre à mitrailler dans tous les sens... surtout le ciel...

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Ce point de rupture, on ne sait pas vraiment s'il est plus dû à un sentiment d'inutilité qui explose, à un délire mégalomaniaque exacerbé par la guerre, à son caractère suicidaire qui ne lui fait trouver de goût à rien... sûrement au final un petit mélange de tout cela; ce personnage, bercé culturellement entre des aspirations romantiques (arh la Kulture) et la situation guerrière actuelle (arh das Krieg) - ce que personnifient parfaitement ses deux camarades en tant que pôles (plus que "potes" - pardon) - est comme tiraillé entre ces deux aspects contradictoires et finit par exploser en un dangereux feu d'artifice(s). Herzog livre un premier film formellement impressionnant et qui révèle déjà en germe toute une réflexion, très contemporaine, sur la solitude, la folie, la mégalomanie, l'homme quoi.

Venez vénérer Werner : ici

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