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1 avril 2008

Le Mari de la Femme à Barbe (La Donna scimmia) de Marco Ferreri - 1963

Sans_titre1Voilà un cinéaste qui manquait à notre colonne de gauche, scandaleusement il faut l'avouer, Ferreri ayant toujours déclenché chez moi des vagues d'hilarité gênées mais salutaires. Le Mari de la Femme à Barbe est dans la veine malpolie habituelle du compère : il paraît qu'il fit un scandale à Cannes, faut pas pousser, mais c'est vrai qu'il est assez malaisé, d'un mauvais goût total, et qu'il ne caresse aucun poil dans aucun sens.

Le grand Tognazzi joue un minable type sans-le-sou qui tombe par hasard sur une "femme-singe" (Girardot), misérable jeune fille à la pilosité impressionnante. Il flaire tout de suite le Sans_titre3bon coup, et monte une affaire de show-business avec la pauvre donzelle comme attraction. On frémit d'abord devant l'absence totale de scrupules de "l'impresario" du dimanche, prêt à vendre sa femme par tous les moyens. On se dit que le singe du titre italien pourrait bien être le mari plutôt que la femme, celle-ci se recroquevillant dans son amour pour lui, dans son abnégation, affrontant le ridicule avec une tristesse désabusée. Mais bientôt, Ferreri retourne son scénario, mettant en place le portrait d'un amour naissant entre ces deux êtres aussi paumés l'un que l'autre. Et du coup, la tendresse et la joie éclatent finalement dans ce petit film beaucoup plus doux qu'il n'y paraît.

Sans_titre2La mise en scène de Ferreri est italianissime, décibels au taquet, bruit et fureur à tous les étages, énormité des personnages, ampleur du style quand il s'agit de montrer la vie qui bat en plein. Il y a quelques morceaux de bravoure ravageurs, comme cette procession de mariage filmée en plan-séquence et en travelling arrière, au milieu des cris de 42000 figurants qui envahissent l'écran et pressent la pauvre Girardot : elle en ressort encore plus misérable, encore plus touchante, victime effarée de la populace et du monde du spectacle. Il y a encore cette scène hilarante chez un "vendeur de neuvaine", qui monnaye la religion à l'aide d'un enfant de choeur au fait des taux de change du monde entier. La religion est d'ailleurs, comme il se doit, égratignée au passage dans Sans_titre5toute sa vénalité et son absurdité, tout comme le monde "cultureux" parisien, qui est montré comme une masse avide de spectaculaire et peu regardante sur l'éthique. Le coup de force final est de parvenir à nous rendre attachants ces "freaks" tonitruants, elle physiquement, lui moralement, et de clore le film sur une touche d'amour et de tendresse qu'on n'attendait pas au milieu de cette histoire brutale et nihiliste. Pas immense, juste audacieux et hors-norme.

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