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30 mars 2008

LIVRE : L'histoire de Bone (Bastard out of California) de Dorothy Allison - 1992

boneRoman très dur que cette chronique de la jeune Bone dans l'Amérique des "perdants". Il y a comme une sorte de malédiction qui s'abat sur les femmes du clan Boatwright dont les rapports de force avec les hommes font le quotidien. Allison nous dresse un portrait très vivant de cette famille de tantes et d'oncles plus ou moins farfelus qui entre deux problèmes d'argent passent leur vie à provoquer des rixes -au sein de la famille ou en dehors-, à tenter de se noyer dans l'alcool, ou à essayer d'y croire entre deux petits boulots et trois déménagements. Bone ne fait pas exception à la règle, prise entre l'amour de sa mère et les violences -sexuelles ou psychologiques- de son beau-père. Car si sa mère semble avant tout vouloir protéger sa progéniture, elle retourne malgré tout toujours auprès de cet homme définitivement dangereux dont elle ne parvient jamais vraiment à se séparer. Bone, ballottée constamment entre les différents membres de sa famille, essaie de rêver sa vie,  s'accroche pour un temps aux chants religieux des gospels -cette musique aussi pleine de vigueur qu'elle est empreinte de tristesse-, tente de comprendre par les yeux de ses tantes pourquoi la vie vaut d'être vécue, mais retombe inexorablement dans la violence domestique, comme si tout espoir lui était fatalement interdit. Pitit extrait: "Je me suis retournée et j'ai plongé la figure dans l'eau. Je n'étais pas une Cherokee. Je n'étais pas une guerrière. Je n'étais pas quelqu'un de spécial. Je n'étais qu'une petite fille effrayée et furieuse. Quand je me voyais dans les yeux de papa Glen, j'avais envie de mourir. Non, je voulais déjà être morte, froide, disparue. Tout semblait sans espoir. Il me regardait et j'avais honte de moi. On aurait dit que je glissais sans arrêt dans un trou, et que je me voyais au fond, sale dépenaillée, pauvre, stupide. Mais une fois au fond, là où il faisait le plus noir, ma colère se manifestait et je savais qu'il n'avait aucune idée de celle que j'étais réellement, qu'il ne me voyait jamais comme la petite fille qui travaillait dur pour tante Raylene, qui avait des bonnes notes malgré les fréquents changements d'école, qui faisait des courses pour maman et s'occupait bien de Reese. Je n'étais ni sale ni stupide et si j'étais pauvre, à qui la faute ?". Pas non plus de misérabilisme, un certain humour, dans les dialogues notamment, plane sur l'ensemble du roman, peut-être à tout prendre un léger fatalisme qui ne serait jamais que l'expression de certaines réalités sociales. La lucidité de Bone face à la condition humaine fait en tout cas mouche et on s'attache à ce personnage qui s'accroche à la vie coûte que coûte. "Ce n'était peut-être pas Dieu qui nous créait comme ça, me suis-je dit. C'est nous qui gâchions tout".

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