Promets-moi (Zavet) d'Emir Kusturica - 2008
Il y a environ 83456 idées dans Promets-moi, et elles sont toutes mauvaises. Kusturica ressemble à ces chanteurs de rock de 16 ans qui pensent que plus on tape fort sur la batterie, plus ça fait du rock'n roll. Il sature donc son film de bruit, voire de vacarme, et de motifs visuels, en se disant que ça suffira bien pour faire un Kusturica movie. Après tout, le truc a déjà fait ses preuves par le passé, y a pas de raison de pas resservir les mêmes fonds de casserole, même un poil cramés. Manque de bol : cet irrespect de son public finit par se voir, et on assiste à un naufrage stylistique de la plus belle veine.
C'est peu de dire que les motifs habituels du sieur tournent ici à vide : une musique tonitruante parfaitement insupportable, là où elle était festive ou émouvante par le passé ; des personnages qui ne sont plus que grotesques, là où leurs déviances conduisaient à une véritable humanité ; le scénario est digne d'un Walt Disney, alors que le gars visait visiblement l'épopée, ou au pire le récit d'initiation ; et les régressions de Kusturica finissent par inquiéter un peu : au premier enculage de poule, on sourit ; au dixième, on pleure. Curieux cette fascination pour le pipi-caca le plus puéril. Curieuse aussi cette volonté effrénée de faire un cartoon alors qu'on est en droit d'attendre un peu plus d'épaisseur du réalisateur d'Underground. D'ailleurs, le gars n'est pas Tex Avery, et son film n'est strictement jamais drôle : gags lourdosses faisant de la surenchère son cahier des charges, personnages qu'il voudrait burlesques et qui ne sont plus que des ombres de freaks très antipathiques, rythmes de comédie épileptiques et illisibles. On se perd totalement dans cette histoire sans intérêt de petit gars qui se déniaise à la ville, étouffés qu'on est sous les grimaces des personnages, les tirs de lance-roquettes de carnaval ou les chutes à répétition. C'est soûlant, épuisant, pénible. A part le plan fugace sur un taureau qui s'endort comme une masse, qui m'a fait piquer un fou-rire pendant une bonne heure, rien à signaler dans cette bouillie bruyante et colorée. Trop "faiseur" pour être un film pour enfants, trop puéril pour être un film pour adultes, Promets-moi s'enfonce profondément dans le grand n'importe quoi, un fourre-tout paresseux et laid qui semble bien signer, après l'immonde La Vie est un miracle, la fin de Kusturica. Emir est mort (j'avais aussi : Emir m'a tuer).