Jane B. par Agnès V. d'Agnès Varda - 1986

Adorable petit film en totale liberté, dans lequel, sous couvert de dresser un portrait fantasmé de Birkin, Varda nous sert une sorte de confession cinématographique intime et mignonne comme tout. Le projet de départ est très joli : faire un "autoportrait" e Birkin, mais filmé par une autre, cette cinéaste en-dehors de tout carcan de trame, de réalisation, d'ordre et de chronologie. On assiste alors à une réflexion (sans le poids de la théorie) sur le regard, à travers des bouts de scénariis laissés ouverts, des tableaux, des fantasmes de films, des plans sur l'actrice et ses partenaires où Varda s'imisce doucement, modestement. Un plaisir immense de retrouver ces artistes qu'on dirait sortis d'un autre temps, Gainsbourg dans une séance de répétition émouvante à mort, Souchon dans un caméo verlainien du meilleur effet, Léotard en roue libre et de ce fait touchant comme tout, Jean-Pierre Léaud bouleversant, Charlotte à 15 ans qui m'a fait retrouver mes amours d'antan (ma première copine était son sosie, vous savez tout)... Jane B. par Agnès V. est un cinéma en ballade, qui se fout de tout canon esthétique, et préfère laisser libre cours à la rêverie, en offrant toute sa place au mauvais goût (Jane en toréador ou en Jeanne d'Arc), au ratage (la parodie de Laurel et Hardy qui semble sortie d'un Mocky), et souvent à la beauté simple des choses (le monologue de Jane, qui montre ici toute son originalité et sa sincérité). Varda aime les peintres classiques, les comédies musicales, la cuisine, les sapins de Noël, les rivières, les polars, la mythologie, et fourre tout ça dan son film, sans ordre, sans but, et c'est bien ça qui fait la beauté de la chose. Quelques plans touchent à la magie pure, comme ces acteurs qui se figent subitement sur une réplique de Léotard, ou ce travelling sur des toiles de Magritte. Varda est la plus libre des cinéastes.

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