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28 août 2007

Meurtre à Yoshiwara (Hana no Yoshiwara hyaku-nin giri) (1960) de Tomu Uchida

Décidément Uchida n'a rien à envier à Mizoguchi tant ce film, en couleur et en scope, dans les milieux des geishas est un modèle de dramatisation qui porte en lui tout le désespoir d'un homme, d'une trajectoire "sacrifiée" d'avance, comme sous l'emprise d'un mystèrieux sortilège.

meurtreayoshiwara3

Abandonné dès sa naissance, Sano est recueilli par un couple de tisserands: en prime, il y a un sabre dans son couffin et une tâche noire qui recouvre la joue droite du nourrisson. On retrouve Sano moult années plus tard, à la tête d'une entreprise fleurissante de tissage - seule ombre au tableau, et toujours sur la face, aucune femme ne veut de lui. Il faut que l'un de ses meilleurs clients insiste àMeurtreYoshiwara_Aff donf pour l'emmener dans les bordels de geishas de Yoshiwara pour qu'il trouve enfin sandale à son pied: il va faire la connaissance d'un ex-taularde ultra vénal et connaîtra enfin l'amour (unilatéralement...)... car cela sonnera aussi le glas de sa tranquillité - Ah fusil, les femmes!!!. Si les patrons de la maison close voient venir de loin ce gros niais provincial thuné à ras bord et qu'ils n'hésitent pas à appeler entre eux "le monstre", cette prostituée de bas-étage va mener parfaitement sa barque pour accéder au rêve de sa vie, devenir première courtisane - pour pouvoir pavoiser dans la rue aux yeux de tous comme une revanche perso sur sa vie jusque là misérable. Pendant tout le film, on serre des fesses à voir comment ce bon bougre de Sano, plein de gentillesse et de largesse, se fait entuber comme un rat mort par ces pro du ryu - la monnaie locale, ouida. Il y a un réel fond de tristesse dans le destin de cet homme crédule et dupe alors que tout le monde autour de lui ne cesse de le mettre en garde - tout en reconnaissant qu'il a bien le droit d'en profiter un peu. Chaque personnage est cadré au plus près, chaque plan d'ensemble est mis en scène avec une précision d'horloger (la confrontation finale entre les propriétaires des geishas et Sano avec sa pouf est magistrale), une mécanique est déclenchée depuis le début qui ne va pas tarder à exploser. Aussi bien dans le rythme du montage, dans le mariage des couleurs, que dans cette atmosphère morose, il y a un génie mizoguchien. Le feu d'artifice final est à la hauteur.

yoshiwara1

Lorsque Sano se rend finalement compte de sa balourdise et de la fausseté des gens qui l'ont manipulé, on va assister, comme d'ailleurs dans La Lance Ensanglantée, à un déferlement de violence, à une vengeance totale: alors que les cerisiers sont en fleurs et que les pétales tombent du ciel avec une précision diabolique (6 pétales par seconde, faisant passer la fin des Parapluies de Cherbourg avec cette neige chimique qui tombe en paquet juste devant la caméra pour un travail de sagouin - je plaisante, j'adore notre french touch), la pouf (ah oui, elle est relativement laide et grosse soit dit en passant, ce qui n'arrange rien) défile en lançant des regards aussi vicieux que Sarkozy le soir de la victoire présidentielle. Heureusement Sano (Fi!) veille.  On assiste à un déferlement de couleur qui n'a d'égal que l'aspect systématique du carnage (64 morts, à vue de nez): Sano décide enfin de régler ses comptes, à sa manière, et les coups de sabre tombent aussi dru que les coups de peigne de mon coiffeur : du très très grand cinéma après 1h30 d'une maîtrise parfaite. Uchida est vraiment un oubli qu'il va falloir se dépêcher de combler. 

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