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1 juillet 2007

Tiresia de Bertrand Bonello - 2003

Film âpre et difficile que ce Tiresia, qui ferait passer les films de Dreyer pour des clips disco. Agacé oudoc_486 fasciné, je ne sais pas encore très bien où me placer vis-à-vis de ce cinéma expérimental, opaque, issu d'une école de l'austérité et de l'exigence. En reprenant le mythe de Tiresias, et en l'adaptant de façon vraiment intelligente, Bonello convainc pleinement : du trouble sexuel du héros jusqu'à sa révélation en oracle, le film se partage en deux parties clairement délimitées. La première est la plus rude, la plus violente : Laurent Lucas, dans le rôle d'un prêtre fasciné par la transsexualité d'une prostituée brésilienne, la retient prisonnière dans sa maison de campagne, puis finit par lui crever les yeux. Le film opère alors un virage radical, et la deuxième partie, apaisée, proche d'une nature certes spartiate mais très bien observée, montre Tiresia développant ses dons de voyance auprès des gens du cru. Jusqu'à sa mort sèche.

doc_488L'ambition du cinéaste éclate à tous les plans, malgré l'apparente épure esthétique de l'ensemble : le rythme lent du film est parfois brusquement cassé par des élans de sentiments, à l'image de ces plans sur de la lave en fusion aux sons de la 7ème de Beethoven, ou de ces cirs stridents et effrayés poussés par l'otage. La nature est filmée en maître, franchement, on sent l'influence dreyero-pialatesque (vous me suivez ?) dans cet amour d'un paysage rude, sans éclat, sans sentimentalité. Et puis Bonello ne fait strictement aucune concession par rapport à son sujet, développant ses thèmes abstraits (l'ambiguité masculin/féminin, la foi, le destin) dans une forme toujours homogène, du début à la fin.

Mais le film n'évite pas toujours une certaine pose arty qui énerve. Dans la symbolique (un hérisson en bouledoc_487 pour exprimer les refoulements de Lucas, un tableau de Modigliani pour montrer la cécité "érotique" de Tiresia), dans sa volonté trop volontaire de brouiller les pistes du récit, dans quelques décadrages malvenus, dans l'opacité légèrement crâneuse de son scénario, on voit apparaître un cinéaste qui se regarde parfois filmer, ce qui casse le charme vénéneux de ce film pourtant courageux. A voir, définitivement, et à repenser, sûrement.

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