Dans Paris (2006) de Christophe Honoré
C'est franchement au poteau que Dans Paris convainc réellement. C'est un film-concept qui, comme tous les films-concepts, est parfois gavant, énervant, et qui ne remporte l'adhésion que pris dans sa globalité. Il faut donc attendre la fin de l'heure 40 pour se rendre compte réellement du projet d'Honoré, ce qui n'est pas plus mal : ça s'appelle l'homogénéité.
Disons, pour simplifier, que c'est un film français, dans le sens générique du terme. On y croise tous les styles du cinéma français, du film psychologique à la comédie burlesque, de la fantaisie sentimentale à la comédie musicale, et tout ça balaye un nombre étonnant de références précieuses. Les 20 premières minutes font croire au désastre : on y voit ce qui fait le pire aspect du cinéma de papa. Dialogues à la con autour d'un couple qui se sépare, déstructuration de petit malin au niveau montage, postures inspirées mais ridicules des acteurs (cette comédienne, Joana Preiss, est une catastrophe), apostrophe au public, c'est un catalogue de ce que faisaient les cinéastes locaux dans les années 90, une horreur. On commence à regretter ses 7 euros, et on attend les premières scènes de Guy Marchand en priant le Seigneur.
Ensuite, Honoré quitte la campagne et retourne donc à Paris pour raconter la dépression de Duris suite à cette rupture. Et là, subitement, le film s'éclaire et devient cohérent. Grâce à la fantaisie impeccable de Louis Garrel (le sosie de Jean-Pierre Léaud) et au naturel hallucinant de Guy Marchand, mais surtout grâce à la cinéphilie "bienveillante" du cinéaste, le film glisse vers un hommage touchant au cinéma, en tentant le pari de mêler allègrement les genres. On a droit par exemple à un copié-collé parfait d'une scène de Truffaut (Domicile Conjugal ?) qui inclut les postures de Doisnel ; à une scène de retrouvailles au téléphone, chantée délicatement par un couple perdu ; à une ballade effrénée et mignonne comme tout dans un Paris romantique et amoureux ; à une scène magnifiquement dialoguée de Marie-France Pisier (tiens, tiens...) ; au pétage de plombs d'un Duris intérieur et parfait de tempo ; tout ça ramassé en un seul film. Et ça tient du miracle, mais ça fonctionne. Certains tics restent agaçants (ces putains de mises au point brusques entre arrière-plan et avant-plan, ces scènes qui n'osent pas aller au bout de leur concept (le pourtant beau plan de Duris qui réécoute la Kim Wilde de son enfance), ces décadrages qui n'amènent rien...), mais l'ensemble, fragile, instable, toujours sur le fil, va son petit bout de chemin avec beaucoup d'assurance. Il y a là-dedans quelque chose d'innocent et de très maîtrisé en même temps. Le style Honoré, au bout de trois films, est définitivement planté. Et je crois que j'aime bien. (Gols - 23/01/07)
Au diapason de mon camarade de jeu: les vingts premières minutes sont une véritable mascarade, on frôle la cata -bribes de dispute de couple, dialogues niveau 5ème, montage énervé énervant... - et je me disais encore une fois que ce film que j'attendais de voir depuis 8 mois allait me désespérer au-delà de toute attente; et en effet peu à peu, on redresse la barre, même si les acteurs (bon j'ai pas de sympathie particulière pour Louis Garrel, j'avoue - ce serait bien qu'il prenne par exemple des cours de diction car ses dialogues sont inexploitables en cours de FLE, eheh...) en font parfois des caisses pour avoir l'air super-naturel; Duris en grande partie sauve les meubles grâce à des scènes très casse-gueule qu'il joue sur le fil: son délire sur Cambodia de Kim Wilde (qu'Honoré en effet coupe avant la fin, comme s'il avait peur d'avoir eu une trop bonne idée), le magnifique dialogue chanté au téléphone (ce qui laisse espérer le mieux pour Les Chansons d'Amour... que je verrai dans en un an, mouinnnn) ou son monologue sur la tristesse à la fin filmé en gros plan. Mais bon, il y a tout de même des poses tout au long du film un peu énervantes, un côté jeune parisien à la cool qui peut fatiguer ou agacer... Enfin, un film où on lit Franny et Zooey et où on cite Brautigan aura toujours ma sympathie. Mais j'attends encore véritablement Honoré au tournant. (Shang - 15/06/07)