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11 mars 2007

La Harpe de Birmanie (Biruma no tategoto) (1956) de Kon Ichikawa

cov_20the_20burmese_20harp_1_Le Japon n'en finit pas de penser et de panser ses plaies et avec ce film Ichikawa livre une oeuvre d'une sobriété qui marque indubitablement des points: il y a les soldats qui malgré la fin de la guerre voudront continuer à se battre et seront massacrés, ceux qui rêveront de rentrer chez eux pour tenter de reconstruire et celui qui se refusera d'abandonner ces corps sur ces rives birmanes; car si tant de sacrifices sont au final bien futiles (comme le dit un Birman, Anglais et Japonais se sont violemment affrontés mais la Birmanie restera la Birmanie), il n'en faut point pour autant oublier ceux qui sont tombés en route - comme si le souvenir était le seul message de paix qui reste.

Mizushima, le joueur de harpe de sa compagnie, toujours là pour donner du baume au coeur à ses compagnons, se retrouve investi d'une ultime mission: persuader la dernière compagnie restée en arrière de capituler. Ceux-ci se la jouent kamikazes et finiront sous les gravats. Mizushima est miraculeusement épargné et commencera une véritable seconde vie; après avoir été sauvé par un moine, il lui prendra ses oripeaux pour partir à la recherche de sa compagnie dans le Sud de la Birmanie; en route il n'aura de cesse de croiser des charniers de ses compatriotes et sera tenté de s'enfuir devant un tel "spectacle": sublime scène au bord du fleuve, entre ciel et terre, où il se met à courir en se couvrant les yeux; il semble vouloir échapper à cet enfer avant de retrouver les siens. Néanmoins,  en assistant à l'enterrement d'un soldat japonais inconnu, il prend conscience que sa mission est peut-être justement de cesser de porter des oeillères et d'aller un à un enterrer ces corps; il trouvera en creusant un énorme rubis birman qui symbolise d'après un autochtone l'âme des morts et n'aura de cesse de parcourir le pays pour rendre un ultime hommage à tous ses corps laissés en pature aux corbeaux; ses amis parqués dans un camp tenteront bien de lui faire entendre raison (iront jusqu'à dresser un perroquet qui a appris par coeur "Mizushima, reviens avec nous" - putain malin le Jap) mais dans une ultime lettre, alors que tout le monde rentre à la maison, il tentera de leur expliquer son geste; il faut bien que certains prennent la responsabilité de ceux qu'on a laissés derrière, il ne faut surtout pas oublier ses massacres, c'est peut-être encore le meilleur garant pour la Paix (il dit des trucs super plus profonds, mais bon je résume hein...).

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Porté par une musique originale qui fait frissonner (je suis moins fan de la harpe ou des chants japonais mais il faut leur reconnaître une certaine puissance...), le film est d'une grande sobriété qui convient parfaitement dans les séquences montrant ce moine muet qui erre parmi les temples birmans et les statues de bouddhas. Comme un grand parfum de sagesse qui plane sur l'ensemble et, dans un Japon encore meurtri et sûrement désireux d'aller de l'avant, Ichikawa réussit un film immense sur le souvenir; avant de construire, il ne faut point faire table rase du passé, il est plus important de penser ses plaies quitte à ce que certaines cicatrices ne s'effacent jamais - c'est peut-être même-là la gageure pour que cela ne se reproduise jamais. Respect Kon.

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